EDF : Une gestion qui sacrifie les renouvelables
L’entreprise publique, en position de force sur l’électricité française, fait primer ses intérêts sur des enjeux d’avenir.
dans l’hebdo N° 1354 Acheter ce numéro
«L a question ne se pose plus. C’est bien EDF qui tire les ficelles » de la politique énergétique en France, écrivait Greenpeace au début des débats sur la transition énergétique, en juin 2014. Et malgré ses 85 % de capital aux mains de l’État, elle se comporte comme n’importe quel grand groupe, en privilégiant un objectif de rentabilité parfois contradictoire avec l’intérêt général.
Le développement des énergies renouvelables s’est donc trouvé en partie soumis au bon vouloir du premier producteur mondial d’électricité et de ses difficultés financières : l’enlisement du chantier de l’EPR de Flamanville (dont le coût a grimpé de 3,3 à 8,5 milliards d’euros). Doivent être ajoutés à l’équation 2,3 milliards d’euros de dividendes versés à ses actionnaires, soit 60 % de ses résultats nets (chiffre 2012), malgré un endettement élevé. Résultat, ses « investissements sont quasi exclusivement consacrés à l’activité nucléaire », écrivaient en mars 2015 les députés de la commission d’enquête sur les tarifs de l’électricité. EDF Énergies nouvelles (EDF EN), sa filiale pour les énergies renouvelables, se retrouve cantonnée à une part marginale des investissements, ce qui « pose la question de sa résilience sur le long terme » face à la transition énergétique, s’inquiètent les parlementaires. L’inefficacité de cette gestion à courte vue n’est plus à démontrer pour le secteur photovoltaïque. EDF EN a agi comme tous les « requins », cherchant avant tout à bénéficier du tarif d’achat encadré par la loi à partir de 2006 en multipliant les projets opportunistes. « EDF énergies nouvelles est d’ailleurs issue de la société SIIF Énergie, qui s’était spécialisée dans la recherche de niches fiscales en allant construire des baraques avec panneaux solaires dans les campagnes isolées dans les années 1990 », rappelle Marc Jedliczka, directeur général de l’Hespul, une association spécialisée dans les énergies renouvelables. Le gel, par le gouvernement, des projets photovoltaïques pendant trois mois, fin 2010, a fait éclater cette bulle spéculative qu’EDF EN avait alimentée, en entraînant la destruction de 12 000 à 15 000 emplois.
EDF n’a pas joué le rôle structurant qui aurait dû être le sien, vu son rang, mais a contribué au contraire à la faillite du système de soutien au photovoltaïque. L’État, quant à lui, « a tour à tour considéré EDF soit comme une vache à lait, soit comme un pompier. Sa part de responsabilité dans la situation actuelle ne peut être négligée », rappelait en mars la commission d’enquête parlementaire, à toutes fins utiles.