La France à l’heure des « listes citoyennes »

Les démarches autonomes se multiplient à la gauche du PS et espèrent se donner un label national pour les régionales de décembre prochain.

Erwan Manac'h  • 17 juin 2015 abonné·es
La France à l’heure des « listes citoyennes »

Le vent nouveau espagnol souffle aussi sur l’Hexagone et pas seulement depuis que Podemos a montré la voie. Les élections municipales ont vu apparaître en 2014 une profusion d’initiatives citoyennes, plus ou moins authentiques. Les innombrables expériences ratées ont démontré que le label « citoyen » ne bénéficiait d’aucun a priori favorable sur l’échiquier français. Mais des victoires symboliques ont été rendues possibles par une convergence inédite des forces. À Grenoble, la liste PG-EELV-mouvements sociaux l’a emporté seule (40 %) grâce à des ingrédients comparables à ceux qui ont permis la victoire d’Ada Colau à la mairie de Barcelone : le travail de terrain des mouvements sociaux depuis des décennies, le charisme d’un leader capable d’incarner le renouveau, la faible popularité du candidat socialiste. Avec en plus un événement imprévisible : un important pic de pollution à quelques heures du vote. On peut y voir également le résultat d’une stratégie initiée aux régionales de 2009 par les Verts, qui pariaient sur des figures issues de la société civile, dont le futur maire de Grenoble, Éric Piolle, faisait partie.

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En France, c’est longtemps un désir d’émancipation qui a motivé l’émergence d’offres politiques en dehors des partis traditionnels. C’est l’exemple des Motivé-e-s à Toulouse en 2001 (12,5 %), ou en 2008 des candidats « Affirmation » qui rejoignaient la majorité socialiste de Noisy-le-Sec, à l’instar de Mohamed Mechmache. Mais cette aspiration à l’autonomie dans les quartiers populaires n’est pas parvenue pas à se donner une visibilité nationale, ni à arracher de victoire symbolique.

Depuis 2011, d’autres formes de contributions « citoyennes » ont émergé : des groupes « a-partisans », attachés à une participation horizontale. Sans financement ni porte-voix, elles éprouvent les plus grandes difficultés à décoller lorsqu’elles tentent leur chance aux élections (2,8 % pour le meilleur score du Parti Pirate en 2012). Même Nouvelle Donne, qui creuse ce sillon depuis l’époque du Collectif Roosevelt en 2012, plafonne en dessous des 4 % aux européennes en 2014. Les 1 199 habitants d’une petite commune rurale de la Drôme ont donné à ce mouvement le symbole qui lui manquait. À Saillans, une liste 100 % citoyenne et « apolitique », née de luttes contre des projets de l’ancienne majorité, a été élue aux dernières municipales et gouverne depuis en s’appuyant sur des groupes d’habitants. Aucun de ses 13 élus n’avait d’expérience politique.

À la confluence de ces mouvements, un consensus semble émerger pour les régionales de décembre 2015. Les appels au rassemblement citoyen à la gauche du PS se sont multipliés dans plusieurs régions (Île-de-France, Midi-Pyrénées, Rhône-Alpes, Normandie, Franche-Comté-Bourgogne, Aquitaine), notamment à l’initiative du PG, et devraient déboucher sur un label national identifiable dans les résultats officiels. Ils misent sur le numérique pour élaborer et faire voter leur programme commun. « Nous ne pouvons pas nous passer des gens qui ne se déplacent pas et ont plein de choses à dire », avertit Joseph Boussion, porte-parole de Nouvelle Donne. Fausse note de taille, le choix d’EELV de s’engager en solitaire avant toute discussion. Le parti écolo a désigné d’office des têtes de liste dans toutes les régions et appelle désormais au rassemblement.

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