Créatifs, réactifs, organisés, joyeux
La lutte climatique suscite un renouveau des mobilisations non-violentes qui attirent les jeunes.
dans l’hebdo N° 1382-1384 Acheter ce numéro
En réunion « permanente ». Décider des actions, Modifier le soir l’idée du matin parce que le ministère bloque. Les militants du climat ont très peu dormi ces dernières semaines. « Confronté en permanence aux injonctions de l’état d’urgence, notre programme a changé toutes les demi-journées », explique un responsable. Les mouvements ont pourtant gagné leur bras de fer avec les autorités, qui n’ont finalement empêché que la tenue de la grande manifestation de rue prévue le 29 novembre.
Paradoxalement la plus classique des mobilisations. « La contrainte nous a poussés à une créativité redoublée », convient Sylvain Angerand, des Amis de la Terre. Une intelligence collective en marche, dans l’obsession de l’invention visuelle et symbolique pour mieux communiquer. Les réseaux sociaux sont en surchauffe. En l’espace de quatre jours, s’organisent un parterre de chaussures pour représenter ceux qui ont été interdits de marche, une chaîne humaine en solidarité avec les victimes des attentats et du dérèglement. On tient le procès des « 196 chaises » (comme autant de pays à la COP 21), subtilisées dans des banques finançant des projets charbonniers. Des brigades de clowns militants détendent les atmosphères par des facéties rarement innocentes. Dans leur « Quartier génial », dans un gymnase de L’Île-Saint-Denis, 200 bénévoles d’Alternatiba brassent, recréent et vivent écolos. Le 12 décembre, une opération inédite de géolocalisation via téléphones mobiles dessine les mots « climate justice peace » en énormes lettres virtuelles sur la carte de Paris. Impossible d’encercler Le Bourget par des « lignes rouges » ? C’est sur l’avenue de la Grande-Armée qu’affluent 10 000 personnes portant rouge – fleurs, habits, parapluie…
Des anges-gardiennes devancent un cortège où volent d’énormes cubes gonflés qui, assemblés au sol, délimitent, avec d’immenses rubans rouges, ces seuils climatiques à ne pas dépasser. D’ingénieuses cornes de brume scandent la chorégraphie. C’est la patte des artistes de 350.org et du Laboratoire d’imagination insurrectionnelle pour une action de désobéissance non-violente, finalement autorisée à la dernière minute et organisée avec rigueur : les participants ont été invités à suivre des réunions de formation pour éviter tout débordement… Les cortèges passent sous la tour Eiffel pour « récupérer » le symbole préempté par la COP 21. « Et n’oublions pas que c’est aussi une fête, parce que nous préparons l’avenir », lance un slogan.