Diesel : Renault épinglé à son tour

Les émissions de l’Espace excéderaient 13 à 25 fois la norme autorisée.

Sasha Mitchell  • 2 décembre 2015 abonné·es
Diesel : Renault épinglé à son tour
© Photo : MEDINA/AFP

Volkswagen n’a pas le monopole du « diesel propre »… qui ne l’est pas. Deux mois après les déboires du fleuron de l’industrie automobile allemande, c’est au tour du constructeur français Renault d’être épinglé pour des émissions de gaz polluants excédant la norme autorisée. Selon les résultats d’une enquête publiée par l’association allemande de protection de l’environnement Deutsche Umwelthilfe (DUH), les émissions d’oxyde d’azote du modèle Renault Espace 1.6 dCi atteindraient un niveau 13 à 25 fois supérieur à celui admis par la réglementation Euro 6.

Cette fois, pas de logiciel permettant de dissimuler le niveau réel d’émissions, mais, alors que la procédure d’homologation actuelle impose un départ à froid, l’université de Berne, chargée de réaliser les tests pour la DUH, a effectué les évaluations à chaud. « Nous avons fait des tests avec le Renault Espace diesel car le modèle avait déjà dévoilé, lors d’autres essais, des niveaux réels d’émissions effrayants. Toutes les variations dans les conditions préalables aux tests avec un moteur chaud au lieu de froid ont donné lieu à des niveaux que nous n’avions encore jamais mesurés », a affirmé Jürgen Resch, directeur de Deutsche Umwelthilfe, lors d’une conférence de presse à Berlin. Sans surprise, Renault a contesté aussitôt les conclusions du rapport, arguant que les procédures d’essais mises en place par l’université de Berne, non conformes à la réglementation européenne, présentent des variations importantes de résultats qui nécessitent, comme l’admet la DUH elle-même, des « mesures complémentaires ». Il n’en demeure pas moins que, sur les six tests réalisés, certains ont montré des taux d’émissions d’oxyde d’azote atteignant 2 000 mg/km, bien loin des 80 mg/km autorisés par la réglementation Euro 6, entrée en vigueur le 1er septembre 2014 – Euro 5, la norme précédente, autorisait des émissions pouvant atteindre 180 mg/km pour les véhicules diesel.

« Nous n’avons pas vu d’émissions aussi élevées depuis la fin des années 1980, avec l’adoption de limites européennes, a constaté Axel Friedrich, cofondateur de l’ONG International Council on Clean Transportation, à l’origine de la découverte du scandale Volkswagen. Il est incroyable que des voitures prétendument modernes, qui polluent l’air ainsi, soient sur les routes. » En octobre, quelques semaines après le scandale Volkswagen, la DUH avait déjà pointé du doigt l’Opel Zafira diesel, affirmant que ses émissions d’oxyde d’azote étaient 17 fois supérieures à la norme Euro 6. À l’époque, elle avait également laissé entendre qu’elle disposait « d’indices détaillés sur la manipulation des émissions » chez plusieurs autres constructeurs. Mais, contrairement à l’affaire Volkswagen, qui mettait en lumière un système de triche organisé par l’entreprise – et ce dès 2009 aux États-Unis, selon les derniers éléments –, ces révélations montrent les limites des normes européennes, et notamment la pertinence des tests sur moteur froid. Pour la DUH, le Renault Espace n’a d’ailleurs pu être homologué qu’après avoir été « préparé » en amont. Bon nombre de constructeurs allègent en effet la masse de leurs voitures et les munissent de pneus lisses afin d’optimiser les performances lors des tests, ce qui signifie que les véhicules passés à l’essai ne sont paradoxalement pas homologués pour la conduite sur route. Des procédés qui confinent à la tricherie. Bien que les conclusions du rapport ne soient pas encore confirmées, il y a fort à parier que Renault n’est pas le seul constructeur dont les nouvelles voitures ne respectent pas, à chaud, la norme Euro 6. Le mythe du « diesel propre » continue de s’effriter.

Écologie
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