Syrie : La quadrature du cercle
Malgré l’intensification des efforts diplomatiques, une solution politique semble toujours aussi éloignée.
dans l’hebdo N° 1382-1384 Acheter ce numéro
Le processus diplomatique avait commencé en octobre à Vienne. Il s’est poursuivi mi-décembre à Riyad et à Genève. Mais la solution politique à la crise syrienne semble toujours aussi éloignée. À Vienne, le 30 octobre puis le 14 novembre, dix-sept pays ainsi que l’Union européenne et les Nations unies avaient affirmé « leur soutien à un cessez-le-feu et à un processus mené par les Syriens pour établir d’ici à six mois […] un calendrier pour rédiger une nouvelle Constitution ». « Des élections libres et équitables » avaient été programmées d’ici à dix-huit mois.
Pour cela, ils avaient admis « la nécessité de réunir le gouvernement syrien et des représentants de l’opposition pour des négociations formelles, sous les auspices de l’ONU, dès que possible, avec l’objectif du 1er janvier ». La formule « le gouvernement » laissant évidemment place à ce que les diplomates appellent une « ambiguïté constructive », en l’occurrence sur la présence ou non de Bachar Al-Assad. Mais il fallait aussi déterminer la représentation des groupes d’opposition, y compris celle des groupes armés, ceux que l’on désigne sous le nom de « rebelles ». Ce sont ces groupes qui se sont réunis mi-décembre à Riyad. Ils ont accepté le principe de négociations avec le régime, exigeant toutefois le départ de Bachar Al-Assad. C’était trop pour l’un des groupes les plus influents sur le terrain, le front Al-Nosra, affilié à Al-Qaïda et militairement très puissant dans l’ouest du pays. Son chef, Abou Mohammed Al-Joulani, qui n’était pas invité à Riyad, a qualifié cette réunion de « trahison ». Selon lui, « la plupart des rebelles invités à Riyad n’ont pas de contrôle sur leurs combattants » et ils ne pourront pas faire appliquer leur accord sur le terrain. Tragique ironie de l’histoire, la Russie, alliée à Assad, a elle aussi fustigé la réunion de l’opposition syrienne avec les mêmes arguments que le leader d’Al-Nosra. « Nous ne pouvons pas accepter la tentative de ce groupe réuni à Riyad de s’approprier le droit de parler au nom de toute l’opposition syrienne », a affirmé le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué. Cependant, à l’issue d’une rencontre, le 10 décembre à Genève, avec des représentants des États-Unis et de l’ONU, le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Guennadi Gatilov, avait toutefois évoqué une « perspective » de progrès dans l’élaboration d’un processus de transition politique. Mais le diplomate russe avait renvoyé à la sélection de représentants de l’opposition qui seraient légitimes, selon Moscou, à l’exclusion de ce que MM. Poutine et Assad appellent les « terroristes ». Autrement dit, tous ceux qui veulent le départ du président syrien. Ce qui ressemble à une quadrature du cercle.
Pendant que s’ébauche cette laborieuse tentative de solution politique, les bombardements continuent. Le 12 décembre, les avions de Bachar Al-Assad ont bombardé des fiefs rebelles proches de Damas, à Douma, dans la Ghouta orientale, où 28 personnes ont été tuées, dont plusieurs enfants et une directrice d’école, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme. Une zone régulièrement frappée par les aviations syrienne et russe, bien que ce ne soit pas une position de Daech. À Homs, c’est un attentat à la voiture piégée revendiqué par Daech qui a tué 16 personnes dans un quartier favorable au régime. On estime à 250 000 le nombre de victimes de la guerre civile depuis mars 2011.