L’Essonne supprime son festival
Le nouveau président du conseil départemental, François Durovray (LR), a supprimé d’un trait de plume le festival Cinessonne.
dans l’hebdo N° 1389 Acheter ce numéro
L’annonce est tombée en début de semaine dernière comme un sinistre couperet : le festival Cinessonne disparaît. Cette manifestation avait pour vocation d’explorer le cinéma européen en train de se faire, qu’il vienne de Belgique ou de Grande-Bretagne, d’Ukraine ou de Bulgarie. Le festival, qui en était à sa 18e édition l’an dernier et avait reçu une ribambelle de cinéastes, dont John Boorman, Milos Forman, Ken Loach, Margarethe Von Trotta ou Andrzej Zulawski, bénéficiait d’une identité forte.
C’est cet événement, qui se déroulait dans les salles indépendantes de l’Essonne, que le nouveau président du conseil départemental, François Durovray (LR), d’un trait de plume, a supprimé. Prétexte : il faut faire des économies et la situation est grave (scie musicale). La hausse des dépenses sociales et les baisses des dotations de l’État en sont les causes. Auxquelles s’ajouterait la mauvaise gestion de l’ancienne majorité, accusation fondée sur un audit contesté. Une guéguerre classique.
Ce sont les choix de coupes budgétaires que M. Durovray a opérés, tout seul comme un grand, qui fascinent. En homme délicat, ami des pauvres et de la poésie, il s’en est pris, avec un rigoureux esprit de système, aux personnes les plus vulnérables ainsi qu’à la culture. Exemples : remplacement de la carte jeune par un dispositif allégé, suppression de la gratuité de la cantine pour les 15 % d’élèves qui en bénéficiaient, disparition du supplément à l’allocation personnalisée d’autonomie pour les personnes âgées, fermeture de l’école de théâtre de Courcouronnes et, donc, arrêt du festival Cinessonne, auquel 80 000 euros sont retirés, 35 % de son budget.
M. Durovray, dont le charmant Dupont-Aignan fut le cicérone, se range parmi les hommes de droite, et c’est à cela qu’on les reconnaît : ils taillent dans tout ce qui leur paraît inutile. En particulier, les crotteux et les chiants d’intellos. Qui peuvent parfois se confondre. Car le festival était la partie visible d’un travail de formation des publics ou de sensibilisation au cinéma d’auteur et à la jeune création auprès des habitants de l’Essonne — cette mission heureusement perdure. Mais M. Durovray est un élu dévoué à son département, qui ne compte désormais plus aucun festival, et à son obscurantisme comptable. On lui souhaite bien des ténèbres.
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