Taubira, démission !
Cette femme est sans doute très sympa, mais elle a une tendance à se foutre de la gueule du monde un peu pénible.
dans l’hebdo N° 1390 Acheter ce numéro
Est-ce que je vais lire le bouquin de Christiane Taubira (CT) – celui, tu sais, où elle exprime notamment, après avoir enfin quitté le ministère de la Justice, qu’elle est contre le projet de révision constitutionnelle que fomentent les « socialistes » au pouvoir ? Nope : j’ai la saison 6 de Downton Abbey à regarder, et je te prie de croire que c’est autrement plus motivant.
Est-ce que j’ai cependant lu, dans la presse comme il faut, tout un tas de savants papiers sur cet ouvrage ? Absolument. Et j’en ai retenu que CT, en l’écrivant, avait méticuleusement évité de s’en prendre directement – et nominalement – à Manuel Valls, et qu’elle avait, « surtout », pris grand soin d’« épargner François Hollande ».
Ce qu’apprenant, je me suis dit que ça confirmait que cette femme est sans doute très sympa, mais qu’elle a une tendance (lourde et un peu ancienne déjà) à se foutre de la gueule du monde qui peut éventuellement devenir un peu pénible.
Ça s’est vu dans les années qu’elle vient de passer dans un gouvernement « de gauche », mais de droite – et d’une droite assez dure –, et durant lesquelles elle a de fait entériné un si gros paquet de vilenies sociales et sociétales que leur énumération excéderait largement l’espace minuscule de ces deux feuillets (dont je quémande comme tu sais depuis l’an de grâce 507 qu’ils deviennent trois) : rappelons tout de même que, dans le meilleur des cas, elle a, pendant tout ce temps-là, quand elle prétendait n’être pas complètement d’accord avec ce qui se tramait depuis l’Élysée et Matignon, manifesté sa désapprobation en balançant sur Twitter des messages à prétention poétique, mais en réalité assez abscons pour tout justifier. Et convenons que c’est un peu court – surtout quand on laisse régulièrement dire partout qu’on est une, je cite, « icône de la gauche ».
Et lorsque, dans le livre où elle dit son opposition à la révision constitutionnelle qui nous arrive sur le coin de la face, elle ménage François Hollande – et lui conserve son estime –, elle continue à nous prendre pour des c… des imbéciles.
Puisque, en effet, le chef de l’État est, bien plus que Manuel Valls – qui, dans toutes les circonstances du quinquennat en cours, n’est jamais que son subordonné et qui a précisément été mis par lui dans Matignon parce que sa personnalité garantissait qu’il se plierait d’excellente grâce à la mise en œuvre de politiques d’inspiration thatchéro-finkielkrautienne –, l’instigateur principal, et partant premier responsable, depuis 2012, d’une droitisation générale des menées gouvernementales qui n’a, je le crains, aucun précédent dans les trente dernières années.
Faire mine d’ignorer cela, que même un enfant d’un mois et demi peut très facilement constater s’il se concentre dix secondes sur l’actualité françousque, relève grosso modo – et toutes choses égales par ailleurs – de la même tartuferie que celle qui fait par exemple honnir le soldat qui commet dans une guerre des saloperies sans nom sans jamais incriminer ses chefferies : promets-moi que tu ne t’y laisseras pas prendre.
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.