Il y a vingt ans… à l’église Saint-Bernard
Le 23 août 1996 au petit matin, des haches s’abattaient sur les portes de l’église Saint-Bernard à Paris. Les CRS évacuaient par la force les 300 sans-papiers qui y avaient trouvé refuge depuis le mois de mars. Retour sur les articles publiés par Politis il y a vingt ans jour pour jour.
Ils étaient trois cents, Sénégalais, Maliens et Mauritaniens, à s’être réfugiés dans l’église Saint-Bernard, dans le 11ème arrondissement de Paris durant le mois de mars 1996. Pour beaucoup, les sans-papiers ont commencé à avoir un visage cet été là. Jusqu’alors, ils étaient restés dans l’ombre d’une « question administrative » masquant des parcours d’individus et de familles demandant refuge et protection à la patrie des droits de l’homme, voulant vivre dans ce pays ou simplement y séjourner avant de repartir vers un autre.
Le 22 août 1996, voici vingt ans jour pour jour, Politis faisait sa une avec une photo de femmes et d’enfants de Saint-Bernard et titrait : « Des papiers pour tous ! ».
Mardi 20 août : quarante-septième jour de grève de la faim pour les dix porte-drapeaux de la lutte collective, écrivait alors Bernard Langlois, directeur de la rédaction, en édito. Et toujours cette menace qui plane d’une intervention policière qu’on attendait pour le chaud week-end du 15 août et qui n’est pas encore venue à l’heure où l’on boucle ce numéro.
Politis reparaissait après sa trêve estivale. Trois jours plus tard, au petit matin, les haches s’abattaient sur la porte de l’église.
Au moment où les CRS ont commencé à défoncer les portes à la hache, il y avait un camarade qui est allé aux grandes orgues et a commencé à jouer une fugue de Bach. » Le prêtre Henri Coindé a entamé une prière : «Tous les êtres auront droit à la terre et à la vie… », se souvient Jean-Claude Amara, militant de Droits Devant (France inter).
Une semaine plus tard, dans le numéro du 29 août, les sans-papiers de Saint-Bernard sont réfugiés à la Cartoucherie de Vincennes. Ils demandent toujours leur régularisation. Le gouvernement du président Chirac « exclut les déboutés du droit d’asile », écrit Françoise Galland dans Politis.
Le débat sur les lois Pasqua est ouvert. Tout le monde semble désormais d’accord pour penser qu’elles sont inadéquates. (…) Mais une partie de la droite veut en profiter pour renforcer les dispositifs répressifs (…) en proposant non seulement le fichage des hébergeants et des limitations d’accès aux soins pour des malades sans papiers, mais aussi la suspension du regroupement familial et du droit d’asile.
Saint-Bernard est devenu le symbole d’une lutte. Mais en vingt ans, de Saint-Bernard à Calais, le sort des sans-papiers en France s’est-il amélioré ?
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