Michael Moore : Europe d’Épinal
Avec Where to invade next, Michael Moore visite le Vieux Continent avec un optimisme forcé.
dans l’hebdo N° 1418 Acheter ce numéro
« On ne sait plus quoi faire, bordel ! » Et voilà Michael Moore commandité par le Pentagone, bannière à la main, traquant sur le Vieux Continent les bonnes idées qui pourraient être utiles aux États-Unis. À commencer par l’Italie et ses trente-cinq jours de congés annuels, son treizième mois, ses cinq mois de congé maternité. De quoi laisser sur le cul le documentariste, plein écran.
En France, le réalisateur choisit de mettre en avant les cantines scolaires dans un village normand, sous la baguette d’un chef qui ne propose des frites que trois fois l’an et ne connaît pas le hamburger, loin du Coca-Cola et du gloubi-boulga servi outre-Atlantique. En Finlande, le meilleur se tourne vers l’éducation, dans un pays où les écoles privées n’existent pas ; en Slovénie, vers les études universitaires gratuites ; au Portugal, du côté d’un État qui a dépénalisé la drogue.
On a tôt fait de comprendre les intentions de Michael Moore dans ce road-movie délibérément optimiste, dressant en creux un noir portrait de l’Amérique. Avec certes de petites perles (un entretien avec l’ex-présidente d’Islande, Vigdis Finnbogadóttir, sur la -thématique des femmes au pouvoir et la gestion saine de la crise économique de 2008, ou encore un clip hilarant de l’administration pénitentiaire norvégienne). Restent une forme et un fond bourrés de bonnes intentions puériles, empilant les sujets, un auteur réalisateur omniprésent, sciemment stupéfait, des portes ouvertes enfoncées, une Italie (parmi d’autres pays) dont on ne parle pas du chômage et montre plutôt le Ponte Vecchio, l’amore et la pasta sur l’air de « Volare », de Domenico Modugno, jusqu’à une mièvrerie voyeuriste sur le port d’arme en Norvège auprès d’un père qui a perdu son fils dans la fusillade de 2011. Était-ce bien utile ?