Réfugiés : L’Italie en première ligne
La péninsule est la principale porte d’entrée en Europe pour les réfugiés. Et se retrouve bien seule à gérer cet afflux massif.
dans l’hebdo N° 1421 Acheter ce numéro
Au cours des deux dernières années, l’Italie a accueilli environ 300 000 migrants sur son territoire. La plupart sont passés par la petite île de Lampedusa, territoire d’à peine 20 km2, le plus au sud de l’Europe. Pour ceux qui n’ont pas fait partie des 21 000 morts noyés en Méditerranée depuis une vingtaine d’années… L’Italie est donc en première ligne, avec un nombre de personnes arrivant sur son sol huit fois plus élevé qu’en Grèce, autre grande porte d’entrée en Europe. Cet été, quasi quotidiennement, tous les journaux télévisés de la péninsule montraient des centres d’accueil totalement débordés et, surtout, comment les villes italiennes, de Milan ou Rome jusqu’à de petits bourgs de province, tentaient de faire face à la situation. La ville toscane de moyenne importance de Lucques a ainsi dû construire dans l’urgence un village de tentes en périphérie logeant plus de 3 000 personnes. Dans les grandes villes comme Turin ou Bologne, les parcs publics, les terrains vagues ou les immeubles abandonnés voient des campements de fortune s’improviser, avec d’inévitables problèmes d’hygiène, en particulier durant la saison chaude.
L’Italie est surtout seule en Europe, ou presque, pour gérer au quotidien cet afflux massif et incessant de populations qui arrivent dans des régions déjà fortement déshéritées, frappées par la crise économique et trop souvent mises en coupe réglée par les mafias. Des mafias qui ne se gênent pas pour exploiter cette main-d’œuvre corvéable à merci, faute de droits et de défenseurs. Mais, au-delà, l’Italie peut compter sur bien peu de solidarités en Europe. Bon nombre de ces réfugiés arrivés sur son sol ont pour projet de poursuivre leur périple vers d’autres pays européens. On connaît bien sûr le pouvoir d’attraction de -l’Angleterre, mais d’autres réfugiés souhaiteraient gagner la France, la Suisse, l’Allemagne ou la Suède. Or, le voisin hexagonal a depuis longtemps fermé sa frontière, avec de nombreux contrôles refoulant les réfugiés à Vintimille ou aux divers points de passage dans les Alpes. De même pour la Suisse, où l’on n’entre pas, ou l’Autriche au passage du Brenner, sans parler de la Slovénie, qui, en outre, a construit un mur au sud de son territoire pour empêcher l’arrivée des réfugiés en provenance de Grèce, fermant de la sorte la route des Balkans.
Les villes italiennes ont ainsi changé très vite de visage, avec de nombreux migrants dans leurs rues qui doivent s’adapter là où ils sont parvenus. Sans pouvoir repartir et rencontrant parfois des réactions de rejet de la part d’une population qui a découvert le phénomène migratoire il y a vingt ans à peine.