Un financier témoigne : « Le CICE est un énorme cadeau »
dans l’hebdo N° 1420 Acheter ce numéro
Pierre* est contrôleur de gestion dans une grande entreprise. Il a les yeux rivés sur les comptes et participe aux décisions financières. Témoignage.
Hollande n’est pas stupide, il souhaitait certainement faire un cadeau aux entreprises en l’enrobant dans une communication sur l’emploi. C’est réussi : le CICE est un énorme cadeau. Mon entreprise est en bonne santé financière, mais elle a quand même touché une très grosse somme.
On peut considérer qu’améliorer la rentabilité opérationnelle permet, sinon d’embaucher, de ne pas licencier. Mais c’est beaucoup plus compliqué : les frais de personnel représentent une masse considérable avec des contraintes propres, indépendantes des allégements fiscaux. Donc, lier les deux, c’est se moquer du monde. En vérité, les entreprises sont en mode business as usual. On prend nos décisions sans tenir compte du CICE. Puis on ajoute la manne. Ça nous sauve ou ça améliore notre rentabilité…
Dans mon entreprise, ce sont les actionnaires qui se sont vraiment engraissés. Notre stratégie était de créer un beau bilan, pour rendre l’entreprise plus attractive pour les futurs acquéreurs. Nous n’avions plus trop de stratégie de développement, c’était “tout le pognon en trésorerie”. C’est vrai pour beaucoup d’entreprises achetées en “LBO” – l’acquéreur rembourse les prêts contractés auprès de la banque d’affaires avec la trésorerie d’exploitation de l’entreprise qu’il achète. Lorsque de telles stratégies sont à l’œuvre dans une entreprise, le cadeau fiscal va directement aux actionnaires, notamment en paiement des intérêts liés au LBO. Tout ça, ils le savaient très bien.
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* Le prénom a été modifié.