Union européenne : Commissaires en eaux troubles
Après le tollé du pantouflage de José Manuel Barroso chez Goldman Sachs, voilà Neelie Kroes surprise dans les eaux troubles d’un paradis fiscal.
dans l’hebdo N° 1421 Acheter ce numéro
On en apprend de belles sur les commissaires européens. Après le tollé du pantouflage de José Manuel Barroso chez Goldman Sachs, voilà qu’une membre éminente de son équipe de « gardiens des traités », Neelie Kroes (photo) est surprise dans les eaux troubles d’un paradis fiscal. Commissaire en charge de la concurrence (2004-2009), vice-présidente de la Commission (2009-2014), cette ex-ministre néerlandaise est restée, jusqu’au 1er octobre 2009, directrice d’une société offshore aux Bahamas, Mint Holdings Limited, selon les révélations du Consortium international des journalistes d’investigation. Un cumul qu’elle avait omis de signaler, en violation du règlement de la Commission qui impose de déclarer tous les rôles de dirigeant, administrateur, superviseur ou conseil occupés au cours des dix dernières années.
Il est vrai qu’avant de rejoindre la Commission, elle avait collectionné les postes dans les conseils de surveillance de sociétés comme Volvo, MMO2, la compagnie ferroviaire néerlandaise, les filiales aux Pays-Bas de McDonald’s, Lucent ou Thales… Une trentaine en dix ans, dans les secteurs les plus divers (logistique, transport, conseil, finance, télécoms, immobilier, BTP), à en croire sa déclaration d’intérêts de septembre 2004, dans laquelle elle avait déjà oublié de mentionner un contrat de lobbying pour Lockheed. Les eurodéputés avaient bien un peu tiqué sur les conflits d’intérêts qu’elle rencontrerait dans sa fonction d’arbitre de la concurrence, mais pour les rassurer elle avait promis de ne pas retourner dans le monde des affaires à l’issue de son mandat. Une promesse oubliée, elle aussi. À la fin de son deuxième mandat, où elle était chargée de la société numérique, elle a rejoint le board de Salesforce, éditeur logiciel américain, et le comité de conseil en politique publique d’Uber.
Deux jours après les révélations sur les activités bahaméennes de Neelie Kroes, le journal portugais Publico révélait alors que José Manuel Barroso avait entretenu des contacts étroits pendant son mandat avec Goldman Sachs. « Ce n’est pas un cartel de la drogue », se défend M. Barroso. Les dirigeants de la banque d’affaires faisaient toutefois parvenir à son cabinet « de manière confidentielle, des propositions sur des changements à apporter aux politiques de l’Union européenne », rapporte Publico. Des potions libérales hautement toxiques.