D’un hideux chantage
Ras-le-bol que nous nous fassions régulièrement traiter d’hitlérien(ne)s par ces misérables.
dans l’hebdo N° 1423 Acheter ce numéro
Il y a peu, l’éditocrate Jacques Julliard, ex-thuriféraire du capitalisme rhénan tardivement reconverti dans la frénésie républicano-laïcarde, donnait, dans l’hebdomadaire Marianne, où se publie toutes les semaines sa prose erratique, ce point de vue sur qui, dans le débat public, ne partage pas ses vues sur le burkini (liste non exhaustive) : « Chaque fois que la France est menacée dans son existence et dans ses raisons d’être, il se forme dans ses marges un parti collabo. »
Comme celui, par exemple, précisait-il – pour qui n’aurait pas immédiatement compris à quoi il se référait –, des « vichystes et pronazis de la Seconde Guerre mondiale ».
Il concluait, toutes décences et pudeurs bues (mais pourquoi s’en serait-il privé, puisque ces saloperies passent dans l’époque comme lettres à la poste, et lui ont, à lui spécialement, valu d’être fait la semaine dernière commandeur de la Légion d’honneur par l’accommodant François Hollande) : « D’ordinaire, ce parti est d’extrême droite et se confond avec la réaction. Aujourd’hui, il est d’extrême gauche. »
Plus récemment, le publiciste d’extrême droite Éric Zemmour, qui n’en finit plus de se spécialiser dans la dénonciation d’une invasion de la France par les musulman(e)s, a quant à lui déclaré : « À chaque fois, en France, une partie des élites s’est donnée corps et âme à l’envahisseur. Nous avons eu ce qu’on a appelé la collaboration dans les années 1940-1945. Nous sommes dans une situation tout à fait comparable. »
Ces vilenies présentent l’avantage, évident, qu’elles permettent aux tristes personnages qui les profèrent – et qui sont en réalité de vivantes incarnations du conformisme idéologique le plus étriqué, lequel consiste ces temps-ci à ensevelir les mahométan(e)s sous des tombereaux d’insanités – de se camper en héros de la Résistance, puisqu’ils sont donc, excusez du peu, en guerre contre des « pronazis » – soit, en gros, toi et moi, et plus généralement tou(te)s celles et ceux qui n’adhèrent pas à leurs méphitiques obsessions.
Et pour ma part, très franchement, j’en ai un peu – un peu – ras le bol de ce hideux chantage. Ras le bol que nous nous fassions régulièrement traiter d’hitlérien(ne)s – ou assimilé(e)s – par ces misérables, et que nous nous abstenions trop de leur faire des réponses un peu directes.
En d’autres termes, je me demande si le temps ne vient pas où nous devrons pour de bon nous (et leur) demander si le (si nombreux) parti de ceux qui, du haut de leurs promontoires médiatiques, excitent dans l’opinion française une constante anxiété anti-musulmane ne rappelle pas, par la hargne croissante [^1] qu’il met à charger une communauté de tant de lourde opprobre, l’abjecte clique qui, naguère, dans les débuts du siècle dernier, s’employait de la même manière, et avec la même opiniâtreté, à installer partout une défiance à l’égard des juifs : celle, en somme, dont les membres ont comme on sait fini dans les rangs de la racaille vichyste et pronazie – la vraie.
[^1] Nourrie d’elle-même et du constat qu’elle est dorénavant admise presque partout comme une composante admissible du débat public.
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.