Trump-Clinton : Déchéances électorales
Au lendemain du deuxième débat télévisé entre Hillary Clinton et Donald Trump, rarement la politique n’aura touché à ce point le fond.
dans l’hebdo N° 1423 Acheter ce numéro
« Mon Dieu, comment suis-je tombée si bas ? », se demandait jadis l’héroïne d’une célèbre comédie de Luigi Comencini. Au lendemain du deuxième débat télévisé entre Hillary Clinton et Donald Trump, c’est l’Amérique qui peut se poser la question. Rarement la politique n’aura touché à ce point le fond. On a surtout retenu de cette confrontation les accusations de viol lancées par le candidat républicain à l’encontre de Bill Clinton. Un contre-feu pour tenter de faire oublier cette vidéo qui le surprend en flagrant délit d’ignominies sexistes, et qui lui a coûté le soutien de quelques caciques du Parti républicain, moins choqués il est vrai par les sorties racistes de leur encombrant candidat. Le paradoxe, c’est que la tonitruante contre-offensive de Donald Trump a eu aussi pour conséquence de faire oublier la publication, le même jour, par WikiLeaks, de centaines de mails venant du clan Clinton et révélant la cupidité de la candidate démocrate, et ses relations fusionnelles avec le monde de la finance. La démocratie américaine est bien malade !
Car, en dépit des apparences, il y a quelques leçons politiques à tirer de l’épisode Donald Trump. Si le candidat « anti-système » a réussi à se hisser si haut, c’est que le système est mal en point. Et Hillary Clinton l’incarne trop bien. L’enrichissement des Clinton par la politique, leurs liens avec les banques, leurs conférences grassement rémunérées, rien de tout ça n’est ignoré des Américains. Mais la politique ne répond pas toujours à des lois logiques. On aurait aimé que l’offensive fût menée par un Bernie Sanders ; elle l’est par un forban qui détourne la colère d’une partie de la population contre les immigrés, les Hispaniques, les Noirs ou les musulmans, et qui flatte les instincts les plus bas. Trump est finalement lui-même l’arme ultime du système qu’il pourfend.
En attendant, l’écart se creuse entre les deux candidats. Clinton dispose, selon les derniers sondages, de onze points d’avance. Signe plus évident encore : le coup de grâce porté par le président républicain de la Chambre des représentants, Paul Ryan, qui a annoncé qu’il « ne défendrait pas » Trump. Anticipant une sévère défaite dans la course à la Maison Blanche, le patron des Républicains tente de sauver les élections législatives qui se tiennent également le 8 novembre. Les Américains éliront les membres de la Chambre des représentants pour deux ans, et le tiers des sénateurs pour six ans. L’après-Trump a peut-être commencé. On aurait tort toutefois de prendre le milliardaire pour un simple phénomène de foire. Lui va peut-être disparaître de cette scène médiatique qu’il affectionne tant, mais un autre démagogue viendra. Car le mal est profond.