Contrôles au faciès : L’État condamné !
La Cour de cassation a finalement condamné définitivement l’État. Un revirement de jurisprudence important.
dans l’hebdo N° 1428 Acheter ce numéro
C’était la proposition n° 30 du programme de François Hollande en 2012 : « Je lutterai contre le “délit de faciès” dans les contrôles d’identité. » On connaît la suite, entre dérives sécuritaires de Manuel Valls et État d’urgence : comme bon nombre d’autres promesses hollandiennes, l’idée du fameux récépissé délivré par les policiers à chaque contrôle fut rapidement enterrée. Depuis, les rapports entre police et population se sont dégradés, et les récentes manifestations de policiers, sans autorisation et en toute illégalité, ont montré de quel côté le gouvernement était prêt à laisser outrepasser l’État de droit…
Spécialité bien française, les contrôles d’identité, trop souvent accompagnés de palpations abusives ou de propos vexatoires, ont donc continué comme avant. Entre stigmatisation des minorités et discriminations assumées, comme plusieurs enquêtes scientifiques l’ont montré, notamment celle du CNRS en 2009, dirigée par René Lévy et Fabien Jobard, sociologues spécialistes de la police.
Dans ce paysage peu ragoutant, treize citoyens, en 2013, espérant peut-être encore une mise en application de la promesse présidentielle, avaient eu le courage d’attaquer l’État en justice pour des contrôles d’identité discriminatoires et répétitifs. En 2015, la cour d’appel de Paris condamnait l’État pour faute lourde pour cinq des plaignants, les preuves étant toujours difficiles à rapporter dans ce type d’affaires. Si l’exécutif n’a jamais cessé de nier le problème, les représentants de l’État sont allés ici jusqu’au pourvoi en cassation. Le 9 novembre dernier, la Cour de cassation a finalement condamné définitivement l’État. Un revirement de jurisprudence extrêmement important puisqu’il renverse la charge de la preuve : il appartiendra désormais à l’État de prouver que les contrôles sont fondés sur des « critères objectifs ». Une vraie victoire pour les plaignants après trois ans de procédure mais surtout, à l’avenir, pour les victimes potentielles de contrôles abusifs !