COP 22 : un échec pour lequel Trump a bon dos !
Arrivés sans idée et sans proposition, les négociateurs attribuent sans honte leur fiasco au nouveau président américain.
À en croire les diplomates et « hautes (bien rares) personnalités » présentes à la conférence climatique – qui s’est terminée vendredi soir au Maroc -, l’absence de décisions marquantes et leur renvoi à plus tard serait due à l’élection de Donald Trump. Ce dernier a certes montré avec les premières nominations de son futur gouvernement que la question climatique serait rapidement oubliée par son administration, sa courte majorité au Sénat ainsi que par la confortable avance républicaine chez les députés. Un exemple entre tous le souligne : un certain Myron Ebell, qui dirigeait un think tank financé par les industries du pétrole, a été nommé pour « réorganiser » (probablement supprimer) l’Agence fédérale de protection de l’environnement. Un organisme de sauvegarde des espèces protégées et des parcs nationaux qu’il a vilipendé pendant des années tout en affichant son climato-scepticisme militant. Pourtant, il ne faudrait pas oublier à quel point les négociateurs des pays riches sont arrivés les mains vides à Marrakech. Incapables d’expliquer ce qu’ils étaient venus y proposer. Trump les a sauvés…
À quoi bon…
Pendant les deux premières journées de négociations qui ont précédé la fatale élection, les experts et représentants officiels se sont donc distingués par leur indécision et leur perplexité. Comme tétanisés par la très relative réussite de la conférence de Paris, comme s’ils n’avaient aucune idée et aucune instruction pour transformer en actions le petit élan donné il y a un an par l’accord de Paris. L’arrivée surprise au pouvoir du milliardaire qui a, par deux fois dans ses interventions électorales, situé Paris en… Allemagne et a accusé les Chinois d’avoir « inventé » le réchauffement climatique pour nuire aux États-Unis, a simplement servi à justifier l’inaction des pays réunis à Marrakech. Sur le thème entendu des dizaines de fois dans les réunions des diplomates malgré les protestions des pays du Sud : « Ce n’est pas la peine d’aller plus loin pour l’instant, puisque le président et ses parlementaires républicains ne seront pas d’accord ».
Ils ne sont donc pas allés plus loin. Se contentant d’exprimer leur volonté de confier la lutte climatique aux initiatives privées et donc aux industriels comprenant qu’ils avaient intérêt, par exemple, à se lancer dans la mise en place des énergies renouvelables sources de profits. Sans qu’il soit le moins du monde question de lutter contre l’augmentation de la « production » de gaz à effet de serre. Des actions qui sont remises à plus tard. D’autant plus que le développement de cette transformation énergétique paraît désormais réservé aux pays industrialisés.
Le jugement sans appel des ONG
Sur le financement, toujours au nom de Trump, les promesses déjà souvent faites ont été renvoyées à 2017 ou à 2018. Tout comme celles visant à rendre plus durable la transformation de l’agriculture en Afrique. Alors que ce thème figurait expressément à l’agenda théorique de la réunion de Marrakech. Comme l’explique le Réseau Action Climat dans son résumé de l’échec marocain : « Sans sursaut de la part des gouvernements pour passer des paroles aux actes, nous nous dirigeons vers un réchauffement planétaire supérieur à trois degrés d’ici à la fin du siècle. La plupart des pays développés sont arrivés sans annonce concrète ni financement pour aider les populations les plus pauvres à s’adapter aux effets du changement climatique et à accéder aux énergies renouvelables. Pour l’instant, les gouvernements s’appuient sur des dynamiques souvent entamées par les entreprises, les villes et les associations. Alors que seuls les États peuvent fixer le cadre réglementaire qui permettra de réaliser plus rapidement la transition vers une énergie 100 % renouvelable et respecter les objectifs décidés lors de la COP 21, dont celui de respecter les droits humains ».
L’élection de Donald Trump ainsi que l’arrivée au pouvoir des climato-sceptiques et des négationnistes de la science n’auront donc été qu’un prétexte pour remettre à plus tard et peut-être à jamais, les décisions qui pourraient sauver la planète. Avant même d’être officiellement en fonction, le nouveau président américain à donc gagné son pari. Et le choix absurde de confier la COP 23 au gouvernement des Îles Fidji tout en l’organisant en Allemagne illustre l’impuissance affichée.
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