Trump élu : Et si la gauche anti-libérale française en sortait renforcée ?
L’élection de Donald Trump a montré les atouts stratégiques d’une campagne de rupture avec la politique traditionnelle. Un enseignement pour la gauche française ?
À quelque chose, malheur est bon. C’est peut-être ce qu’a pensé Jean-Luc Mélenchon en découvrant ce matin les résultats des élections américaines. Si France 2 a déjà désigné – visiblement sans craindre la prophétie auto-réalisatrice – Marine Le Pen comme la grande gagnante de l’élection américaine (elle sera l’invitée du JT de ce soir), le candidat de la France Insoumise pourrait également tirer quelques marrons du feu du désastre outre-Atlantique. Lui aussi a décidé de faire campagne hors partis, lui aussi se présente comme le candidat du peuple, lui aussi promet une rupture claire et nette avec le libre-échange, le néo-libéralisme et ses variantes, y compris sociale-libérale…
Le candidat à la présidentielle de 2017, on le sait, avait observé avec intérêt et espoir la campagne de Bernie Sanders. Il estimait ce matin que le socialiste américain « aurait gagné » face à Donald Trump. Aussi, sans craindre de pousser un peu loin l’analogie, a-t-il, sur facebook et son blog, tiré cinq « leçons » de l’élection du milliardaire républicain :
Leçon 1 : les primaires sont une machine à museler l’énergie populaire ! Leçon 2 : la droitisation de la droite est une pente sans limite. Leçon 3 : la droitisation de la “gôche” est un désarmement unilatéral. Leçon 4 : les “démocrates” sont le problème, pas la solution, pour qui veut barrer la route à ce qui monte de partout en Europe et en France. Leçon 5 : il faut descendre d’urgence du train fou atlantiste.
Et de conclure : « Avec la France insoumise, rejetez les Clinton français : vous vous éviterez la honte d’être les fourriers des Trump locaux ! »
Oublié le revers subi par Jean-Luc Mélenchon samedi dernier, lorsque les cadres communistes ont voté contre un soutien à sa candidature en 2017 : « Il n’est plus sûr que les candidats français du “système” soient à même d’enrayer la montée du populisme droitier, écrit le communiste pro-mélenchon, Francis Parny, sur son blog. La présence de Jean-Luc Mélenchon au deuxième tour des présidentielles devient une garantie pour empêcher la victoire d’un Trump dans notre pays. »
Pas d’alternative « molle »
Si les mélenchonistes n’ont pas tardé à utiliser l’élection de Trump pour leur auto-promo, ils ne sont pas les seuls à estimer que la gauche française a besoin de rupture, si elle veut faire barrage à la victoire de l’extrême droite en 2017. « Dans l’état actuel de délitement de la gauche, Jean-Luc Mélenchon est une voiture-bélier, une candidature de combat », a estimé l’écolo Noël Mamère lors d’un échange avec l’intéressé, organisé par le site du mensuel Regards.
Nombreux sont ceux qui estiment désormais que seul un Bernie Sanders français pourrait tenir tête à Marine Le Pen. Et Jean-Luc Mélenchon n’est pas le seul à se voir dans le rôle. Au PS, le « frondeur » Benoît Hamon, candidat à la primaire, a ainsi estimé dans un message vidéo « qu’il n’y a pas d’alternative molle à la crise du système libéral » :
On a, dans l’élection présidentielle qui s’annonce, plusieurs formes de perpétuation du système, a-t-il alerté dans un message vidéo. Une forme technologique, avec le libéralisme d’Emmanuel Macron, une forme résignée avec le libéralisme de François Hollande, une forme enthousiaste avec le libéralisme d’Alain Juppé. Toutes ces versions du libéralisme conduiront à la probabilité de l’élection de Marine Le Pen à la présidence de la République française.
À l’instar de son camarade socialiste, l’eurodéputé Guillaume Balas, il a ensuite appelé à sortir des traités de libre-échange en Europe. « Clinton, candidate « centriste » du système était la pire candidate », a de même estimé le député frondeur Pascal Cherki.
Plus tôt dans la journée, l’ambassadeur de France aux États-Unis avait regretté sur Twitter, avant de supprimer son tweet, qu’avec l’élection de Trump, « c’est la fin d’une époque, celle du néolibéralisme. Reste à savoir ce qui lui succèdera ». Si même lui le dit…
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