Yannick Jadot : « Face à Trump, l’Europe doit redevenir leader de la lutte climatique »
Le candidat écologiste à la présidentielle de 2017 évalue les conséquences des mesures climaticides du programme du nouveau locataire de la Maison Blanche.
Donald Trump a promis de remettre en cause l’adhésion des États-Unis à l’Accord de Paris sur le climat. Que faut-il redouter avec son élection ?
Yannick Jadot : Il a aussi annoncé qu’il comptait démanteler l’Agence de l’environnement, diminuer les aides au secteur des renouvelables, assouplir les normes d’émissions du charbon, revenir sur l’annulation de l’oléoduc Keystone XL : tout cela serait dévastateur, bien sûr. Cependant, les États-Unis sont juridiquement contraints par leur ratification de l’Accord de Paris, qui sera effectif en 2020 ce qui signifie qu’une sortie n’en sera possible qu’à partir de 2021 seulement – donc après la fin du mandat de Donald Trump.
Dans quelle mesure pourra-t-il facilement passer à l’acte ?
À ce stade, il est prématuré de spéculer sur les moyens dont il disposera pour mettre en œuvre des choix aussi radicaux. Rappelons que le Parti républicain s’est fortement divisé sur son soutien.
Cela dit, Obama l’a montré, le président peut gouverner par décret quand il est bloqué par le Congrès. Il a utilisé cette arme pour durcir les normes d’émissions du charbon ou annuler l’oléoduc Keystone XL. On peut donc redouter que le nouveau locataire de la Maison Blanche, qui est profondément anti-écolo, agisse rapidement pour faire tomber les contraintes réglementaires. En revanche, il n’a pas la main sur les fondamentaux économiques qui ont contribué à effondrer le marché du charbon et dynamiser les énergies renouvelables.
Depuis plusieurs années, la communauté internationale a appris à se passer de l’aval des États-Unis pour avancer sur les questions climatiques. Quel impact réel aurait la politique de Donald Trump ?
Washington ne détient pas toutes les cartes. Depuis plus d’une décennie, des villes et des États fédérés étasuniens ont pris des décisions fortes concernant le climat, contrecarrant l’immobilisme de l’échelon fédéral en la matière.
Au niveau international, la position de la Chine sera déterminante. Depuis un an, Pékin et Washington ont pris le parti d’agir de concert sur les engagements climatiques dans un mécanisme de « donnant-donnant ». Si l’élection de Donald Trump ne change rien pour la Chine sur le plan domestique – la réduction de la pollution atmosphérique reste un impératif –, conservera-t-elle l’attitude constructive dont elle a fait preuve à la COP 21 et lors des négociations multilatérales si les États-Unis ne suivent pas ?
Les regards vont donc se tourner également vers l’Union européenne, qui se trouvera dans la responsabilité de redevenir un leader comme il y a quelques années dans la lutte climatique. À défaut, on pourrait assister, à la remorque des États-Unis, à un « effet domino » conduisant à d’autres retraits de l’Accord de Paris : la Russie, par exemple.