Clivage : Migrants, querelles de chiffres
Deux lignes s’opposent. Celle de Manuel Valls, et celles de Vincent Peillon et de Benoît Hamon, plutôt critiques sur l’action du gouvernement et de l’Europe.
dans l’hebdo N° 1437 Acheter ce numéro
Si, avant le début de la campagne des primaires, les voix se faisaient plutôt silencieuses dans le camp socialiste au sujet des migrants, l’échéance électorale devient l’occasion pour les candidats de marquer leurs divergences. Le deuxième débat télévisé de dimanche après-midi en a donné la preuve.
Jean-Claude Mas
secrétaire général de la Cimade « Les candidats à la primaire avancent des non-propositions. Ils se situent tous dans la continuité de la politique menée jusque-là : une politique de dissuasion, qui, lorsqu’elle ne contrôle pas, fait la sourde oreille. Et lorsqu’elle souhaite enfin accueillir, elle le fait d’une manière largement insuffisante. C’est une conduite à risque car nous sommes dans un climat où l’opinion paraît sensible au discours de rejet. Pour certains candidats, il aurait été nécessaire d’accueillir plus. C’est indéniable. Mais il n’y a aucune remise en question des traités, comme les accords de Dublin. Le visa humanitaire, que propose Benoît Hamon, existe déjà. Tant mieux s’il demande que ce dispositif soit davantage mis en place, mais c’est insuffisant. La volonté de lutter contre l’immigration irrégulière fait fi de la persécution que doivent affronter les migrants. Les centres humanitaires qui doivent en théorie les mettre à l’abri appliquent une politique de contrôle. Ce sont des centres de tri qui opposent les individus. Pour la Cimade, il est nécessaire de sortir de cette logique, en remettant des voies légales d’immigration, et en arrêtant la procédure Dublin. La France peut accueillir. Surtout lorsqu’on voit qu’une partie de l’opinion est solidaire. Ce qui est intéressant, c’est qu’elle s’indigne de la situation des réfugiés en s’affranchissant des législations, pour ne prendre en compte que l’intégrité des personnes. Les candidats à la primaire devraient s’en inspirer. »Le nombre de ceux-ci est l’un des principaux points de clivage entre les candidats. « Aujourd’hui, sur 100 migrants, 2 viennent en Europe. Sur ce chiffre, 1,5 va en Allemagne », a exposé Benoît Hamon. À -Laurence Ferrari, qui lui demandait -combien de migrants la France devait accueillir, le candidat a répondu qu’ils ne sont pas « des marchandises ». « Sommes-nous à la hauteur de ce que sont nos valeurs ? », s’est-il interrogé, confirmant sa volonté d’accueillir plus de réfugiés, et dans de meilleures conditions. Vincent Peillon se situe dans la même perspective. N’hésitant pas à reprendre Manuel Valls au cours d’un échange assez vif, durant lequel l’ancien ministre de l’Éducation a rappelé les engagements non tenus de la France, qui a accueilli environ 5 000 migrants sur les 30 000 promis. Il a aussi évoqué un « désaccord profond », notamment sur le démantèlement « tardif » de la jungle de Calais, alors qu’il « partage la proposition de Benoît Hamon, d’accueillir dans la durée ».
Les deux hommes avancent différentes propositions. Benoît Hamon suggère la création d’un « visa humanitaire » pour « ouvrir une voie légale et sécurisée au territoire français ». De son côté, Vincent Peillon souhaite installer « un corridor humanitaire » directement implanté dans les pays voisins de la Syrie, évitant ainsi les « traversées mortelles », tout en contrôlant les entrées en Europe. Mais quid de ceux qui arrivent, entre autres, -d’Érythrée ou du Soudan ? Deux mesures qui visent toutefois à lutter contre les réseaux de passeurs. Sylvia Pinel propose quant à elle un « statut de demandeur d’asile européen ». Pour Jean-Luc Bennahmias et François de Rugy, ce sont davantage d’aides aux ONG qui doivent être versées.
Arnaud Montebourg, pour sa part, est resté à l’écart de cette passe d’armes. Il s’était toutefois prononcé contre les accords du Touquet lors de sa visite du camp de Grande-Synthe, en décembre 2016. Conclus en 2003 par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, ils permettent à l’Angleterre de contrôler sa frontière directement sur le territoire français. Le candidat souhaite leur renégociation.
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