Houssam El-Assimi, autre coupable de délit de solidarité ?

Le militant de « La Chapelle debout ! » était jugé pour « rébellion et violence sur personne dépositaire de l’autorité ». Son procès a été reporté.

Judith Perrin  • 18 janvier 2017
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Houssam El-Assimi, autre coupable de délit de solidarité ?
© PHILIPPE LOPEZ / AFP

Houssam El-Assimi, 31 ans, le dit lui-même, la 28e chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance n’est malheureusement qu’un « tribunal pour petites frappes ». Figure emblématique du collectif d’aide aux migrants « La Chapelle debout ! », il s’est vu convoqué avec les « droits communs ». Mais ce ne sera pas pour cette fois. Le procès a été reporté au 5 mai, à la demande de son avocat. Houssam El-Assimi se considère victime d’une rafle. Il juge bon de rappeler la définition qu’en donne le Larousse : « Opération d’arrestation massive opérée dans la rue à l’improviste. » Le 30 septembre dernier, il a été arrêté avenue de Flandre alors qu’il tentait d’informer de leurs droits des réfugiés expulsés et embarqués par la police. Celle-ci l’a appréhendé avec violence (ce qui lui vaudra trois jours d’ITT) puis gardé à vue pour « rébellion et violence sur personne dépositaire de l’autorité ».

Une conversation surréaliste avec la police

Houssam El-Assimi relate une conversation surréaliste pendant sa détention. « Si vous aimez tant les migrants, pourquoi vous ne les prenez pas chez vous ? », lui a demandé un policier. Un autre d’enchérir : « Vous savez pourquoi il n’y en a pas en Russie ? Poutine en fait de l’engrais, lui au moins il est courageux. » Outre que, selon Houssam El-Assimi, son arrestation est totalement infondée, sa garde-à-vue a été prolongée sans raison valable. Mais loin de s’appesantir sur sa situation, il estime en substance n’être « qu’une victime collatérale », alors qu’il faudrait se soucier des migrants. C’est pourquoi il aurait voulu profiter du procès pour « soulever des questions de fond » :

Nous, ce qu’on veut, qu’on soit condamné ou qu’on ne le soit pas, c’est que le tribunal assume le caractère politique de son jugement.

Ce n’est pas la première fois que ce militant reconnu dénonce le « racisme d’État, le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), le manque d’indépendance de la justice ». Il s’est déjà exprimé, le 26 mai dernier, au Théâtre de la ville lors de la lecture de Chronique d’une violence institutionnelle qu’il avait coécrit avec Valérie Osouf, autre membre de « La Chapelle debout ! ». Par ailleurs, il a déjà été arrêté, le 9 novembre, pendant une manifestation de soutien aux migrants autorisée par la préfecture, mais rendue illégale par la police. À l’occasion de ce premier procès où il a été relaxé, il regrettait déjà que la justice « esquive tout débat sur l’accueil des migrants ».

Ils sont là, le fait qu’on refuse de les voir, le fait qu’ils soient altérisés à l’extrême et transformés en statistiques, a pour conséquence qu’on les laisse mourir dans la rue.

« Épuiser nerveusement et ruiner financièrement les militants »

Dans le cas du procès du 17 janvier, son avocat a exigé le report pour pouvoir rassembler davantage de témoignages, visant autant à prouver l’innocence de son client qu’à créer une tribune favorable aux migrants, même si Houssam est bien conscient que ces audiences finalement ne font qu’« épuiser nerveusement » les militants et « les ruiner financièrement ».

Au total, entre ses deux procès, il aura déboursé 5 500 euros, prélevés en partie dans la caisse de solidarité du collectif, donc in fine au détriment des migrants. Voilà pourquoi, quand on lui demande s’il a l’intention de porter plainte contre la police pour arrestation abusive, il hésite…

Conversation politique, à la sortie de l’audience

Mardi après le report du procès, devant la « chambre pour petites frappes », Houssam El-Assimi a longuement discuté avec ceux qui étaient venus le soutenir, à savoir sa mère, un ancien réfugié devenu « un ami proche », des stagiaires en journalisme, des militants aguerris et abonnés aux salles d’audience depuis l’état d’urgence et ses conséquences répressives, une classe de l’Ecole des hautes études en sciences humaines (EHESS) venue en observation, et Eric Coquerel, coordinateur du Parti de gauche et conseiller régional de l’Île de France.

En attendant la décision du tribunal ce 5 mai, le prévenu, qui risque quand même 3 ans de prison et 45 000 euros d’amende, n’a pas l’intention de renoncer à son devoir de solidarité envers les migrants. Ce qui fait dire à sa mère : « Pourvu qu’il ne soit pas encore arrêté d’ici-là. »

Société Police / Justice
Temps de lecture : 4 minutes
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