Obama : Au Moyen-Orient, hésitations et incohérences

Barack Obama n’a pas su imposer à Israël la création d’un État palestinien. Et a déçu dans le contexte des révolutions arabes.

Denis Sieffert  • 11 janvier 2017 abonné·es
Obama : Au Moyen-Orient, hésitations et incohérences
© Israel Premiership Press Office/ANADOLU AGENCY/AFP

Ce n’est pas le seul échec de Barack Obama, mais c’est le plus cinglant. Ses convictions auraient pu faire de lui l’homme qui a imposé à Israël la création d’un État palestinien. Au lieu de cela, l’extrême droite israélienne au pouvoir a bien eu à subir quelques sermons et les nombreuses visites du secrétaire d’État, John Kerry, mais guère plus. Tout avait pourtant commencé le 4 juin 2009 au Caire par un magnifique discours dans lequel Obama affirmait que les États-Unis ne seraient « jamais en guerre contre l’islam » et se prononçait clairement pour la création d’un État palestinien. Un « nouveau départ », pensait-on, après le cauchemar des années Bush et du « choc des civilisations ».

Les espoirs palestiniens ont rapidement été déçus. Les relations du président démocrate avec Benyamin Netanyahou en sont restées à de vaines manifestations d’antipathie personnelle. Avec quelques humiliations, comme en 2010 cette annonce d’un nouveau plan de colonisation alors que le vice-président Joe Biden était en visite en Israël. Sur un seul dossier, Obama n’a pas cédé : celui du nucléaire iranien. Un accord avec Téhéran a été trouvé alors que Netanyahou rêvait d’un conflit ouvert. Mais, pour le reste, le mandat d’Obama restera peut-être comme celui durant lequel la solution « à deux États » a été enterrée.

Comble du paradoxe : en octroyant, en septembre 2016, 38 milliards de dollars d’aide militaire à l’État hébreu, l’Amérique d’Obama a battu les records de ses prédécesseurs. Dans ces conditions, l’abstention des États-Unis qui a permis le 23 décembre l’adoption par le Conseil de sécurité de l’ONU d’une résolution ordonnant à Israël de cesser « immédiatement et complètement » la colonisation ressemble à une ultime vengeance à la veille de la prise de fonction de Donald Trump. Un geste de cette nature, survenant plus tôt, aurait eu un impact considérable. John Kerry y était, semble-t-il, favorable deux ans plus tôt, mais il en aurait été empêché par Obama…

Le président démocrate n’a pas été plus brillant dans le contexte des révolutions arabes. En Égypte, il a eu certes le mérite de « lâcher » très vite Hosni Moubarak, mais il n’a guère manifesté sa désapprobation au moment du sanglant coup d’État du général Sissi de juillet 2013. Enfin, en Syrie, Barack Obama a effectué un curieux pas de clerc en menaçant le régime de Bachar Al-Assad de frappes en cas de recours aux armes chimiques, puis en y renonçant lorsqu’en août 2013 le dictateur syrien a franchi cette fameuse « ligne rouge » que le président américain avait tracée. Les États-Unis ont ensuite concentré leurs coups sur Daech en Irak et dans l’Est syrien, semblant se désintéresser de la question syrienne. Un désengagement délibéré qui a eu pour effet de donner un feu vert à Vladimir Poutine pour « régler » le conflit de la façon que l’on sait.

Au total, Barack Obama se sera montré sur ces dossiers hésitant et inconséquent. Sans même parler de son soutien réaffirmé à la monarchie saoudienne. Mais il n’a fait là que gérer les affaires courantes d’un pacte pétrolier qui perdure depuis 1945.

Monde
Temps de lecture : 3 minutes

Pour aller plus loin…

La Brigade rouge : un poing c’est tout !
Portfolio 20 novembre 2024 abonné·es

La Brigade rouge : un poing c’est tout !

Pour pallier les carences et manquements de l’État indien, l’ONG la Brigade rouge s’est donné pour mission de protéger et d’accompagner les femmes qui ont été victimes de viol ou de violences sexistes et sexuelles. Reportage photo.
Par Franck Renoir
À Koupiansk, en Ukraine, « il ne reste que les vieux et les fous »
Reportage 20 novembre 2024 abonné·es

À Koupiansk, en Ukraine, « il ne reste que les vieux et les fous »

Avec les rapides avancées russes sur le front, la ville de Koupiansk, occupée en 2022, est désormais à 2,5 km du front. Les habitants ont été invités à évacuer depuis la mi-octobre. Malgré les bombardements, certains ne souhaitent pas partir, ou ne s’y résolvent pas encore.
Par Pauline Migevant
À Valence, un désastre climatique et politique
Reportage 20 novembre 2024 abonné·es

À Valence, un désastre climatique et politique

Après les terribles inondations qui ont frappé la région valencienne, les réactions tardives du gouvernement de Carlos Mazón ont suscité la colère des habitants et des réactions opportunistes de l’extrême droite. Pour se relever, la population mise sur la solidarité.
Par Pablo Castaño
Pourquoi les Démocrates ont perdu l’élection présidentielle
Analyse 13 novembre 2024 abonné·es

Pourquoi les Démocrates ont perdu l’élection présidentielle

Après la défaite de Kamala Harris, les voix critiques de son parti pointent son « progressisme », l’absence de considération des classes populaires et le coût de la vie aux États-Unis. Les positions centristes de la candidate pour convaincre les électeurs indécis n’ont pas suffi.
Par Edward Maille