Europe : À l’origine d’un divorce
Le référendum de 2005 sur le TCE, au résultat bafoué, a semé le scepticisme dans la société et divisé la gauche.
dans l’hebdo N° 1446 Acheter ce numéro
Le 29 mai 2005, les Français consultés par référendum rejettent à 55 % le Traité constitutionnel européen (TCE). Trois ans plus tard, faisant fi du vote populaire, Nicolas Sarkozy, avec la complicité du PS et de la majorité de ses parlementaires, modifie la Constitution et fait voter une loi qui permet de ratifier le traité de Lisbonne, copie conforme du texte rejeté lors du référendum. Cet épisode a distillé dans toute la société un profond scepticisme envers nos institutions et la démocratie : à quoi bon voter si le vote est bafoué ?
Il a aussi divisé durablement la gauche. À l’été 2004, François Hollande, premier secrétaire du PS, décide d’organiser un référendum interne pour arrêter la position du parti sur cette constitution européenne. Lui y est favorable et n’a aucune difficulté à convaincre sa majorité, à l’exception notable de Laurent Fabius. Ce dernier va faire campagne pour le « non » avec la gauche du PS, alors éclatée en deux courants, le « Nouveau Parti socialiste » (NPS), dirigé par Vincent Peillon, Arnaud Montebourg et Benoît Hamon, et « Nouveau Monde », du tandem Henri Emmanuelli-Jean-Luc Mélenchon. Le débat est vif et déborde vite des rangs socialistes. Face aux arguments des opposants au traité, qui font mouche, le premier secrétaire transforme cette consultation en référendum sur sa personne. Le 4 décembre, le « oui » l’emporte avec près de 59 %. Par discipline de parti, le NPS renonce à faire campagne pour le « non ». Emmanuelli la reprendra quand le « non » passera en tête dans les sondages. Ce n’est pas le cas de Mélenchon, qui va faire campagne pour le « non » avec l’association qu’il a créée un an auparavant, « Pour la république sociale » (PRS). « C’est clairement une rupture avec la tradition la plus évidente du PS », reconnaît-il aujourd’hui [1]. Il fait tribune commune avec Marie-George Buffet, Clémentine Autain, Olivier Besancenot, José Bové et des altermondialistes. Ce faisant, lui et ses amis font l’expérience du « grand large » et de « l’autre gauche », qui va les éloigner définitivement du PS en novembre 2008.
[1] Le Choix de l’insoumission, Jean-Luc Mélenchon, entretien avec Marc Endeweld, Seuil, 380 p., 18 euros.