Quand les politiques réécrivent l’histoire

Olivier Doubre  • 1 mars 2017
Partager :
Quand les politiques réécrivent l’histoire
© Photo : Philippe Lissac/Godong/AFP

Les Français en auraient-ils assez des tentatives de nos politiques d’imposer un fantasmatique « récit national » ? Le succès d’Histoire mondiale de la France (Seuil), dirigé par Patrick Boucheron, pourrait le laisser penser. Car cet ouvrage, qui tend à multiplier les regards et les approches d’une France au sein du monde, refuse justement de « céder aux crispations réactionnaires l’objet “histoire de France” » et « cherche à ressaisir sa diversité ». Cinglante réponse aux tenants d’une histoire linéaire, officielle et glorieuse de la « Grande France », l’ouvrage est aussi un démenti aux tentations récupératrices des Le Pen ou Fillon, voire à certains discours républicanolâtres qu’on peut entendre à gauche.

À l’heure où une nouvelle génération d’historiens s’est engagée massivement dans cette aventure éditoriale collective, on a vu Emmanuel Macron qualifier de « crime contre l’humanité » la colonisation française. En dépit de l’ambiguïté éventuelle de cette qualification juridique, force est de constater, comme le salue ici l’historien Benjamin Stora, que, « cette fois, on en a parlé », grâce certainement à un « élément de génération » puisque le jeune candidat n’a pas vécu la période.

Notre dossier, rappelant un certain nombre de faits historiques longtemps occultés et « redécouverts » par des historiens courageux, aborde également la question des programmes scolaires, autre domaine où la tentation des politiques d’imposer leur lecture du passé national est forte. Peine perdue, dirait-on avec Jacques Le Goff, pour qui l’histoire est toujours « le résultat d’un va-et-vient constant de l’historien du passé au présent et du présent au passé »

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Les personnes LGBT+, premières victimes de violences sexuelles
Étude 21 novembre 2024 abonné·es

Les personnes LGBT+, premières victimes de violences sexuelles

Une enquête de l’Inserm montre que de plus en plus de personnes s’éloignent de la norme hétérosexuelle, mais que les personnes LGBT+ sont surexposées aux violences sexuelles et que la transidentité est mal acceptée socialement.
Par Thomas Lefèvre
La santé, c’est (avant tout) celle des hommes !
Santé 21 novembre 2024 abonné·es

La santé, c’est (avant tout) celle des hommes !

Les stéréotypes sexistes, encore profondément ancrés dans la recherche et la pratique médicales, entraînent de mauvaises prises en charge et des retards de diagnostic. Les spécificités féminines sont trop souvent ignorées dans les essais cliniques, et les symptômes douloureux banalisés.
Par Thomas Lefèvre
Philippe Martinez : « La gauche porte une lourde responsabilité dans la progression du RN »
Entretien 20 novembre 2024 abonné·es

Philippe Martinez : « La gauche porte une lourde responsabilité dans la progression du RN »

Pour Politis, l’ancien secrétaire général de la CGT revient sur le climat social actuel, critique sévèrement le pouvoir en place et exhorte les organisations syndicales à mieux s’adapter aux réalités du monde du travail.
Par Pierre Jacquemain
Thiaroye, un massacre colonial
Histoire 20 novembre 2024 abonné·es

Thiaroye, un massacre colonial

Quatre-vingt ans après le massacre par l’armée française de plusieurs centaines de tirailleurs africains près de Dakar, l’historienne Armelle Mabon a retracé la dynamique et les circonstances de ce crime odieux. Et le long combat mené pour briser un déni d’État aberrant.
Par Olivier Doubre