Guyane : Vers un durcissement du conflit ?
Une manifestation devait se tenir mardi à 14 h à Kourou, ville-symbole pour la population des inégalités.
dans l’hebdo N° 1448 Acheter ce numéro
« Irréaliste ! » C’est ainsi que Bernard Cazeneuve, en sortant de la réunion à Matignon au retour de Cayenne des ministres de l’Intérieur et des Outre-Mer, a qualifié la revendication de 2,5 milliards d’aides de l’État à la Guyane posée par les représentants du mouvement revendicatif qui secoue la Guyane depuis près de quinze jours (cf. Politis n° 1447). Najat Vallaud-Belkacem a cru bon d’ajouter qu’au vu des 250 millions d’euros promis pour le secteur de l’éducation, « les contestataires jouent la surenchère ! » Des qualificatifs qui ont peu de chance de « calmer » les militants de ce puissant mouvement, dont les représentants avaient refusé dimanche 2 avril, tard dans la nuit, la proposition gouvernementale d’une aide d’un milliard d’euros étalée sur cinq ans. Ils l’ont jugée insuffisante pour rattraper « un retard de cinquante ans ».
Les collectifs de la population n’entendent donc pas rentrer dans le rang, plus motivés que jamais. Une manifestation s’est tenue mardi à 14 h à Kourou, ville-symbole pour la population des inégalités de traitement et d’investissements de l’État, d’où décolle la fusée Ariane 5. Le blocage du centre spatial est d’ailleurs l’un des moyens de pression les plus efficaces, vu le coût exorbitant de tout retard dans le programme de la fusée. Le port de Cayenne continuait également d’être bloqué, entraînant un début de pénurie dans les supermarchés. De même, l’essence manque de plus en plus dans le département. Le vol quotidien d’Air France Orly-Cayenne a dû être annulé ce mardi, faute de carburant pour le retour, la compagnie prévoyant pour les jours prochains une escale technique au Surinam voisin pour « se ravitailler en carburant » avant de rentrer sur Paris. Toute la Guyane est rassemblée dans la poursuite de ce mouvement inédit par son ampleur, et l’on peut craindre après l’échec des négociations ce week-end que le conflit se durcisse désormais.
Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.
Faire Un Don