Attentat de Manchester : la grande retenue des politiques britanniques
Dès l’attentat, toute la classe politique du Royaume-Uni a suspendu la campagne législative, à dix-sept jours du scrutin. Une décision qui tranche avec certaines réactions politiques en France.
Le concert de la chanteuse états-unienne Ariana Grande touchait à sa fin, vers 22h30 lundi 23 mai, lorsqu’une très forte explosion est advenue dans la Manchester Arena. La plus grande salle de spectacles d’Europe, pouvant réunir jusqu’à 21 000 personnes, était bondée.
Plus l’enquête avance, plus il semble qu’un seul homme ait actionné une ou des charges explosives, sans doute artisanales, qu’il avait sur lui, causant immédiatement un mouvement de panique. La foule, tentant de s’enfuir à tout prix, s’est engouffrée dans les escaliers vers les différentes sorties, ce qui a sans doute augmenté encore le total des blessés.
Le bilan à la mi-journée mardi est lourd : on déplore 22 morts, dont de nombreux enfants et adolescents, puisque Ariana Grande est particulièrement populaire auprès d’un public jeune. En début d’après-midi, le groupe État islamique a revendiqué l’attentat.
À dix-sept jours des législatives, prévues le 8 juin, les dirigeants de tous les partis politiques britanniques ont interrompu leur campagne électorale, en premier lieu la Première ministre conservatrice Theresa May, qui fut la ministre de l’Intérieur du précédent gouvernement Cameron, et Jeremy Corbyn, le leader du Parti travailliste.
À deux mois de l’attaque autour du Parlement de Westminster, l’heure était à la retenue après ce nouvel attentat, qui est le plus meurtrier depuis ceux revendiqués par Al-Qaida dans les transports londoniens en juillet 2005, qui firent 52 morts. Aucune voix ne s’est fait entendre pour réclamer des mesures exceptionnelles, encore moins un quelconque état d’urgence.
Récupérations politiciennes
Avec un certain flegme très britannique, les sujets de sa Gracieuse Majesté semblent vouloir continuer à vivre « normalement », considérant que sinon les terroristes auraient remporté une victoire.
Des réactions bien différentes de celles qu’on a pu connaître après l’attentat sur les Champs-Élysées contre des policiers à trois jours du premier tour de la présidentielle – et plus encore après la tuerie du Bataclan, pourtant assez semblable à celui à la Manchester Arena.
Cette fois encore, Marine Le Pen a tenté de récupérer l’événement à son profit. En campagne législative à Oignies (Pas-de-Calais), la présidente du Front national a ainsi déclaré à la presse : « Je persiste à dire, j’assume mon propos, on ne fait pas le nécessaire pour protéger les Français face à cette menace islamiste terroriste. »
Déjà, ce matin, Georges Fenech (LR), ancien magistrat et président d’une commission d’enquête sur les moyens de l’État pour lutter contre le terrorisme, se demandait sur Twitter : « L’urgence du premier gouvernement d’Emmanuel Macron est-elle une 13e loi de moralisation de la vie publique depuis 1988 ou la lutte antiterroriste ? » Sans doute un peu honteux, il a ensuite supprimé ce tweet, se défendant dans un autre message de toute « récupération politicienne des attentats ». Mais le député lyonnais n’a pu s’empêcher de bientôt « récidiver » en appelant, un peu plus tard sur France Info, le gouvernement à mettre en œuvre les « 40 propositions » de sa commission d’enquête, en particulier l’expulsion de « tous les étrangers radicalisés »…
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