Cyberattaque et fachosphère
L’affaire des « MacronLeaks » est extrêmement sérieuse, même si elle n’a pas perturbé le scrutin du second tour.
dans l’hebdo N° 1453 Acheter ce numéro
De cette attaque informatique, Hollywood pourrait faire un thriller haletant. Mais dans la réalité, elle a quelque chose de glaçant. Vendredi 5 mai, vers 20 h 30, sont mis à disposition sur un site américain des documents issus de comptes e-mails de proches d’Emmanuel Macron qui participent à sa campagne. Une masse de données livrées sans filtre, et piratées selon la méthode de l’« hameçonnage », faisant croire à la victime qu’elle se trouve sur un site connu où elle renseigne ses identifiants et mots de passe… Ce sont les MacronLeaks : des faux mêlés à des documents authentiques où se côtoient argumentaires, pièces comptables et grilles de salaires, mais aussi échanges privés. Et ce à quelques heures de la clôture de la campagne officielle, interdisant à l’équipe d’En marche ! de répliquer.
Une aubaine pour ceux qui s’empressent de les diffuser sur Twitter. Comme Jack Posobiec, militant américain pro-Trump, ou Wikileaks. L’organisation de Julian Assange, tout en précisant qu’il s’agit d’une « possible blague », relaie sans retenue, avec le même zèle dont elle a fait preuve envers les mails du directeur de campagne d’Hillary Clinton lors de la présidentielle outre-Atlantique. Enfin, à 23 h 40, Florian Philippot, imité par d’autres responsables du Front national, envoie un tweet impeccablement conspirationniste : « Les #MacronLeaks apprendront-ils des choses que le journalisme d’investigation a délibérément tues ? Effrayant ce naufrage démocratique. »
Le parquet de Paris a ouvert une enquête, et l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, le gendarme français de la cybersécurité, a été saisie. Autrement dit, l’affaire est extrêmement sérieuse, même si elle n’a pas perturbé le scrutin du second tour. D’autant que rien, dans ces MacronLeaks, ne semble sujet à révélations tonitruantes. Les commanditaires ? Les regards se tournent vers la Russie, déjà soupçonnée dans des affaires semblables. Mais, en l’occurrence, un État n’est peut-être pas lui-même impliqué. Mounir Mahjoubi, responsable de la campagne numérique d’En marche !, penche plutôt pour « une fachosphère hyper organisée et soutenue par des forces et des organisations étrangères ». Un mondialisme informatique de l’extrême droite, en quelque sorte. Une internationale délinquante et dangereuse, profondément antidémocratique.
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