Merci pour la démonstration
Dans une série de tweets hallucinés, Anne Hidalgo demande l’interdiction d’un festival « interdit aux Blancs ».
dans l’hebdo N° 1456 Acheter ce numéro
Reprenons calmement.
1) Le collectif Mwasi organise à Paris, du 28 au 30 juillet, un festival afroféministe, qui sera, est-il précisé, « organisé en plusieurs espaces ». Plus précisément : il y aura, d’une part, comme cela s’est toujours fait – pour d’évidentes et ô combien légitimes raisons – dans le combat contre le racisme et le sexisme (liste non exhaustive), des espaces non mixtes, respectivement réservés aux « femmes noires », aux « personnes noires » et aux « femmes racisées », et d’autre part un « espace ouvert à tou(te)s ».
2) Immédiatement, l’extrême droite, qui n’a comme on sait jamais été à un bobard près – puis qui n’aime rien tant que de justifier sa xénophobie par l’agitation d’un imaginaire « racisme anti-Blancs » –, dénonce un « festival interdit aux Blancs ».
3) Immédiatement, la Licra (où l’on éprouve, semble-t-il, beaucoup plus de difficulté à bien tolérer, parfois, que des racisé(e)s décident seul(e)s des modalités de leurs luttes qu’à adopter le même vocabulaire que le FN) entérine cette appellation délirante [1], cependant qu’SOS Racisme « condamne » sans rire « la tenue d’un festival discriminatoire à Paris ».
4) Immédiatement, Anne Hidalgo [2], maire « socialiste » de Paris (qui chaque année, au mois de mai, s’accommode de ce que l’ultradroite défile dans sa ville) déclame, dans une série de tweets hallucinés : « Je condamne avec fermeté l’organisation de cet événement “interdit aux Blancs”. Je demande l’interdiction de ce festival. Je me réserve également la possibilité de poursuivre les initiateurs de ce festival pour discrimination. » Cela lui vaut notamment d’être chaudement félicitée par Robert Ménard, from Béziers.
5) Or, la mairie de Paris subventionne régulièrement un autre espace féministe de non-mixité : la Maison des femmes, dans le XIe arrondissement de la capitale. Itou : la municipalité est partenaire du Festival international du film lesbien et féministe de Paris, « dont l’accès est réservé aux personnes s’identifiant en tant que femmes ». Et cela ne paraît poser aucun problème – fort heureusement.
6) Adoncques, et par conséquent, ce n’est de fait que lorsqu’elle est revendiquée dans le contexte d’un festival afroféministe par des femmes noires et racisé(e)s qu’Anne Hidalgo dit tout soudain combien l’offusque la non-mixité : un grand merci au Mwasi pour cette implacable démonstration.
[1] Dans un surcroît de délicatesse respectueuse, la Licra profère également que « Rosa Parks doit se retourner dans sa tombe ».
[2] Deux jours plus tard, la même, toute vergogne bue, explique, dans une nouvelle série de tweets, que c’est grâce à cette « intervention » que le festival pourra finalement se tenir, dans des conditions qui sont, en réalité, exactement celles prévues, dès le départ, par ses organisatrices, et contre lesquelles l’élue s’était emportée sous les applaudissements de son homologue de Béziers.
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.