Ordonnances : La loi travail II s’annonce pire que prévu
Les projets d’ordonnances dévoilés par Le Parisien vont bien au-delà de ce qu’Emmanuel Macron avait annoncé durant sa campagne. Tout n’avait pas été dit non plus aux syndicats.
Comme en février 2016 pour la loi travail I, c’est par voie de presse, et dans Le Parisien, que les contours provisoires de la loi travail II ont été révélés lundi 5 juin. Première surprise, ce ne sont plus 3 mais 8 chantiers qui devront être menés par ordonnances, c’est-à-dire sans travaux parlementaires, dès la fin de l’été.
La première ordonnance, jugée « prioritaire » concerne l’énorme chantier de « l’inversion de la hiérarchie des normes ». Comme la loi El Khomri a commencé à le faire pour le temps de travail, des pans entiers du droit du travail seront désormais négociables à l’échelle de l’entreprise. Ainsi, les termes du contrat de travail (motifs de licenciement, préavis, indemnités) deviendraient modulables, comme le respect de la grille de salaires de la branche professionnelle, ce qui ouvre la porte à des baisses de salaires. Si les seuils d’exposition des salariés aux matières dangereuses restent dans la loi, le droit d’alerte, le droit de retrait en cas de danger, la protection pour les salariés de moins de 16 ans ou encore les obligations en matière d’équipements relèveraient des accords d’entreprise.
Autre surprise de taille, selon Le Parisien, le gouvernement entend ouvrir dès l’été, par voie d’ordonnance, la réforme explosive de l’assurance chômage. « L’État doit reprendre la main » et la caisse d’assurance chômage, gérée aujourd’hui par les syndicats, devra être « financée par l’impôt », lit-on dans les motifs de la huitième ordonnance. Comme annoncé lors de la campagne, celle-ci prône l’extension des droits chômage aux démissionnaires, ce qui laisse présager une baisse des allocations, car le candidat Macron tablait sur une économie de 10 milliards d’euros par an sur l’assurance chômage, qui sera difficile à atteindre par une baisse durable (et honnête) du nombre de demandeurs d’emploi.
Enfin, ce qui choque dans cet avant-projet de loi, c’est l’absence de concessions du nouveau président de la République. La création d’un « chèque syndical » et l’incitation à associer les salariés aux conseils d’administration des grandes entreprises pèseront peu, face aux nombreux casus belli qui figurent dans le texte révélé ce lundi : plafonnement des indemnités prud’homales, fusion des instances représentatives du personnel, référendum d’entreprise à l’initiative de l’employeur. Alors que depuis le 23 mai, les syndicats sont reçus à Matignon pour dialoguer sur cette réforme du travail, ceux-ci n’ont pas eu accès à certaines dispositions du texte, qui ne se trouvent que dans le document d’orientation. Voilà qui donne le ton pour le quinquennat.
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