Paul Weller garde sa ligne
Comme si le temps n’avait pas de prise sur lui, le rocker anglais sort un treizième album brillant.
dans l’hebdo N° 1463 Acheter ce numéro
Au moment où l’on célèbre le quarantième anniversaire de l’explosion punk de 1977, on ne peut s’empêcher de repenser à notre première rencontre avec Paul Weller. C’était au printemps de cette fameuse année sur la scène parisienne du Palais des glaces, qui accueillait une poignée de groupes punks anglais, dont un trio survolté, habillé en noir et blanc de pied en cap, les Jam. Le leader en était Paul Weller, qui signait toutes les compositions originales.
Quarante ans plus tard, Weller ne vient pas fêter un quelconque anniversaire mais plus simplement présenter un nouvel album, le treizième d’une carrière solo entamée en 1992 après la parenthèse Style Council, ce concept froid et sans âme que même les adeptes les plus assidus du néo-mod n’ont jamais réussi à comprendre. D’autant que la musique produite était à l’exact opposé de ce qui est venu ensuite et reste encore magnifiquement à l’œuvre. Cette soul gorgée de sève et de sentiments, portée par la voix de Weller, l’orgue et les chœurs féminins. Ce que résumait le titre de l’album de 1997, Heavy Soul. Encore ne mentionnait-il pas cette touche mélancolique très présente, comme une brume d’automne qui rend presque étrange l’écoute de cet album sous le chaud soleil d’un été prématuré.
Son surnom anglais de mod-father, croisement de godfather (parrain) et de mod, résume finalement assez bien à la fois le statut de référence de Paul Weller pour le rock anglais et sa fidélité à une ligne qui lie étroitement un univers musical et une façon d’être. Cette fidélité le voit inviter deux chanteuses soul qui ont débuté leur carrière dans les années 1960, P.P. Arnold et Madeline Bell, et, dans un genre différent, l’ex-Soft Machine Robert Wyatt sur un titre, à la trompette et au chant.
On comprendra que le titre de ce disque, A Kind Revolution, n’annonce pas un bouleversement musical radical. Weller s’en est expliqué à la sortie de l’album : l’« aimable » révolution évoquée est surtout une révolution des esprits : « Il doit y avoir un éveil spirituel pour que le monde change. »
Paul Weller n’est sans doute pas devenu pour autant un artiste engagé, il est simplement conscient du monde qui l’entoure, ce qu’il était déjà avec les Jam, dont nombre de morceaux étaient empreints de commentaire social. Une tradition qui traverse le meilleur du rock anglais.
A Kind Revolution, Paul Weller, WEA.