Le prêche d’Emmanuel Macron pour transformer l’Europe
Lors d’un discours à la Sorbonne, mardi 26 septembre, le chef de l’État a multiplié les propositions pour « refonder l’Europe ». Nous avons recensé les principales mesures évoquées par le Président.
Candidat, Emmanuel Macron n’avait pas hésité à enfiler la casquette du « pro-européen ». Quand la plupart de ses concurrents marquaient plus ou moins de distance avec l’Union européenne, le candidat En Marche ! ne cessait de s’affirmer comme son plus fervent défenseur à grands coups de formules creuses depuis trop longtemps rabâchées. « Nous avons besoin de l’Europe car elle nous rend plus grand, l’Europe nous rend plus fort », clamait-il en début d’année, lors d’un meeting à Lille.
Une élection et un début de quinquennat plus tard, le désormais Président, continue sur sa lancée. Mardi 26 septembre, dans le grand auditorium de la Sorbonne, « Jupiter » a exposé sa vision quant à l’avenir du vieux continent. Lors d’un discours de plus d’une heure et demie, le chef de l’État a balayé une multitude de sujets pour finalement présenter une sorte de feuille de route pour les dix années à venir. « Je prends la responsabilité de proposer », a déclaré le Président à son auditoire. Nous avons récapitulé ses propositions.
Institutions
• Créer un poste de ministre des Finances de la zone euro.
• Réduire le nombre de commissaires européens. Emmanuel Macron souhaite le faire passer de 27 à 15.
• Mettre en place des « conventions démocratiques ». Il s’agirait de débats nationaux organisés sur une durée de six mois, partout en Europe. L’objectif : profiter de ces débats pour mieux définir « la feuille de route de demain ».
• Renforcer le Parlement européen par des listes transnationales, pour les élections européennes de 2019, en utilisant le quota des députés britanniques partants (73 parlementaires).
Migrations
• Créer « dans l’année qui vient un office européen de l’asile, mettre en place des fichiers interconnectés et des documents d’identité biométriques sécurisés, ainsi qu’établir progressivement une police des frontières européenne ». Macron a également fait part de sa volonté de financer, via l’Union européenne, « un large programme européen de formation et d’intégration pour les réfugiés ».
Économie et fiscalité
• Créer une taxe sur les transactions financières affectée à l’aide au développement.
• Créer un budget pour financer des investissements communs. Des impôts seraient prévus pour nourrir ce budget.
• Sur le travail détaché, il propose de faire payer les cotisations sociales dans le pays où le travail est effectué mais en redistribuant les sommes collectées dans le pays d’origine.
• Définir une fourchette de taux d’impôt sur les sociétés pour 2020 tout en veillant à s’adapter à la réalité économique de chaque pays, et à encadrer la concurrence par les niveaux de cotisations sociales.
• Créer une Agence pour l’innovation de rupture, de manière à financer en commun les nouveaux pans de l’économie comme l’intelligence artificielle.
• Assurer la convergence sociale et fiscale des pays de l’UE en fixant des critères qui rapprochent progressivement les modèles sociaux et fiscaux, notamment sur le Smic. Le respect de ces critères conditionnerait l’accès aux fonds de solidarité européens.
Sécurité et Défense
• Créer une force commune d’intervention européenne pour 2020, un budget de défense commun et une « doctrine commune » pour intervenir ensemble.
• Mettre en place au plus vite le Fonds européen de défense, la coopération structurée permanente et les compléter par une « initiative européenne d’intervention » pour intégrer les forces armées européennes.
• Créer une Académie européenne du renseignement pour « assurer le rapprochement de nos capacités de renseignement ».
• Créer une « force commune de protection civile » pour mieux répondre aux catastrophes naturelles telles que les séismes et incendies.
Éducation
• Donner une nouvelle ampleur au programme Erasmus. L’objectif est que 50 % des étudiants européens passent au moins six mois dans un autre pays européen d’ici 2024.
• Créer des universités européennes, sorte de réseaux d’universités qui permettraient d’étudier à l’étranger et de suivre des cours dans au moins deux langues.
Des réactions partagées
Les réactions à cette foule de propositions sont partagées. Du côté des satisfaits, on retrouve une partie du personnel politique comme le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker.
En revanche, du côté des associations, le discours d’Emmanuel Macron est jugé peu crédible. Ainsi, s’agissant de la création d’une taxe financière pour tous les pays européens, le porte-parole d’Attac, Dominique Plihon, dénonce dans un communiqué une simple posture pour faire illusion : « Cette semaine ont été présentés les textes budgétaires visant à alléger la taxe française sur les transactions financières. Quant à la taxe européenne, au lendemain de son élection, Emmanuel Macron avait insisté pour repousser un accord pourtant proche à l’horizon lointain du Brexit. Les apparences ne doivent tromper personne : Emmanuel Macron cherche à enterrer la TTF européenne tout en sauvant les apparences. »
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