Beck : Le flop de la pop
Créé en collaboration avec un magnat de la pop, le nouvel album de Beck déçoit.
dans l’hebdo N° 1475 Acheter ce numéro
En 2009, Beck lançait sur la toile son Record Club. Le projet : reproduire en 24 heures des classiques du rock. Il y eut The Velvet Underground and Nico, puis Songs of Leonard Cohen et Kick,d’INXS. Un peu folle, l’expérience poussait au plus loin l’un des piliers de la musique du Californien : la citation. En vingt-cinq ans de carrière, Beck n’a cessé de cumuler les références. Un peu de hip-hop façon Wu-Tang Clan, des mélodies à la Neil Young et, si souvent, des hommages à son maître, David Bowie.
Pourtant, chez Beck, comme chez nombre d’artistes qui le pratique, l’art de la citation ne se limite pas aux guillemets. La référence amène à la distorsion, aux commentaires. On rend hommage à la tropicália brésilienne pour travailler des arrangements électroniques. On élabore un album entier en déplaçant le logiciel de références. « Comment créer un disque qui observerait les sources d’inspiration premières, rock et folk, depuis le prisme de la funk ? », semblait, en 1999, s’interroger Midnite Vultures. Un disque passionnant et drôle.
Colors, dernière proposition de Beck, est un disque pop, une machine ultra produite, avec des morceaux formatés pour la radio. La collaboration avec Greg -Kurstin, ancien compagnon de route devenu producteur d’Adele, explique peut-être cette mutation. Faire un album pop en gardant l’hybridité artisanale d’un disque 100 % Beck, tel semblait être le défi. Malheureusement, on passe à côté. Là où le funk avait donné à Beck légèreté et inventivité ludique, la pop semble l’écraser de tout le poids de ses arrangements poussifs et de ses chorus prévisibles. On s’amuse peu en écoutant Colors. Et des onze titres, on n’en retiendra que quelques-uns, les plus « beckiens », « Dear Life » et son piano bluesy, « Fix Me », jolie ballade conclusive et le très « 90’s » « Wow ».
Colors, Beck, Caroline International/Capitol.