« L’Insoumis » : faute d’un regard
Le documentaire de Gilles Perret manque d’un point de vue singulier sur son personnage, Jean-Luc Mélenchon.
dans l’hebdo N° 1491 Acheter ce numéro
En amour, il faut être deux. C’est la même chose quand un documentariste décide de braquer sa caméra sur une personne pour en faire son personnage. Gilles Perret, le réalisateur de La Sociale, a suivi Jean-Luc Mélenchon lors de sa campagne présidentielle, du mois de février jusqu’au premier tour. Nous voilà donc avec « l’Insoumis » dans un TGV, au cours d’un meeting, dans son QG de campagne, à Rome (« c’est beau »), avec un homme du « peuple », sur un plateau de télévision (où il est l’objet d’un « traquenard »)…
Et ça cause, un Mélenchon, avec sa tchatche légendaire : de sa stratégie, d’un point de son programme, du PS… Parfois un silence s’impose : celui qui précède l’entrée dans l’arène publique du héros. Jean-Luc Mélenchon, qui use beaucoup du « nous », est de tous les plans de L’Insoumis, et centralement.
Oui, pour réaliser le portrait en campagne d’une telle bête politique, il aurait fallu être deux. L’animal devant la caméra, des yeux derrière. On songe à Barbet Schröder, se confrontant à Jacques Vergès. Ou à Raymond Depardon, dévoilant le Giscard de façade. Or, Gilles Perret semble s’être absenté. Mélenchon occupe tout l’espace. C’est lui qui domine l’entreprise. Quel est le regard singulier porté sur lui ? Quelle rencontre, même empathique, est à l’œuvre ? Quel pan de réalité que nous ignorions concernant « l’Insoumis » soulève le film ? Trois questions, et trois fois hélas…