Carte scolaire 2018 : la vérité des chiffres
Alors que les mobilisations contre les fermetures de classes se multiplient, le SNUipp-FSU, principal syndicat du primaire, veut faire entendre sa voix pour améliorer vraiment l’école.
Le SNUipp-FSU, après une enquête auprès de 97 départements, dévoile la réalité des chiffres de la carte scolaire 2018. Il conteste les affirmations gouvernementales, assurant qu’il n’y aurait jamais eu « autant de classes ouvertes et de maîtres devant élèves ».
Cette dotation est insuffisante pour assurer le dédoublement des CE1 de REP+ et des CP de REP qui à lui seul « consomme » 5 442 postes [1]. De même, les fermetures en rural s’élèvent à 808 postes et non « entre 200 et 300 » comme annoncé par le ministère.
Conséquence de cette dotation insuffisante : la facture est lourde pour les dispositifs « Plus de maîtres que de classes » dont plus de 1300 postes disparaissent sur les 3 000 existant encore à la rentrée 2017, alors même que ce dispositif plébiscité par la profession et aux résultats prometteurs n’a pas été évalué. Une facture lourde également pour la maternelle avec un solde négatif de près de 850 classes, paradoxal à quelques jours des assises, tout comme pour le rural avec un solde négatif de 808 classes. SI le remplacement est abondé de 334 postes et l’enseignement spécialisé de 224, cela ne représente qu’une goutte d’eau au regard des ponctions opérées les années passées et des besoins actuels.
Redéploiement de moyens
Cette dotation insuffisante qui a conduit à des redéploiements de moyens a été à l’origine de nombreuses mobilisations dans tout le pays rassemblant enseignants, parents et élus.
Outre ces chiffres qui démontrent l’insuffisance de postes, il y a aussi ce que ce que cette préparation de rentrée raconte. Affirmer donner la priorité au primaire ne peut pas être qu’un slogan : cela doit se traduire concrètement. La baisse démographique aurait pu permettre ici ou là des allègements d’effectifs, alors que plus de 100 000 classes dépassent 25 élèves (RERS 2017), la taille des classes va encore augmenter en dehors des CP et CE1 en éducation prioritaire.
Comment parler de l’importance du langage en augmentant la taille des classes en maternelle ? Comment justifier que les effectifs allégés sont facteur de réussite sans que cela concerne tous les élèves ? Comment justifier l’attention aux conditions d’apprentissage quand en milieu rural on trouvera à la rentrée des cours multiples à trois voire quatre niveaux à plus de vingt élèves ?
Ce sont toutes ces interrogations qui prédominent. Car s’arc-bouter sur une bataille de chiffres ne doit pas cacher certaines réalités. Donner plus à ceux qui ont moins est juste à condition de ne pas dégrader la situation de tous les autres.
Améliorer l’école a un coût, certes économique mais dépend également du projet que l’on porte pour l’école. Au SNUipp-FSU, nous voulons une école qui s’attaque aux inégalités scolaires, qui fasse sienne l’idée que tous les élèves sont capables de réussir et leur en donne les moyens.
L’école primaire française largement sous-investie doit faire l’objet d’un engagement financier massif pour une meilleure formation des enseignants, des effectifs abaissés, des enseignants spécialisés, des remplaçants, un accompagnement pour réussir l’inclusion, des dispositifs pour les moins de 3 ans, des maîtres en plus pour travailler différemment…
La priorité au primaire ne peut en effet se payer de mots.
Francette Popineau, Régis Metzger et Arnaud Malaisé sont co-secrétaires généraux du SNUipp-FSU
[1] Les chiffres de la Guadeloupe et de Mayotte non disponibles actuellement ne sont pas comptabilisés dans ce total.
Le dossier complet est sur le site du SNUipp ici.
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