La faute morale du président du Crif

Francis Kalifat a prétendu d’interdire à Jean-Luc Mélenchon de participer à la marche blanche organisée mercredi soir en mémoire de Mireille Knoll.

Denis Sieffert  • 28 mars 2018
Partager :
La faute morale du président du Crif
photo : Francis Kalifat avec Gérard Collomb.
© LUDOVIC MARIN / POOL / AFP

Ainsi donc, le président du Crif, Francis Kalifat, s’est arrogé le droit – fort heureusement en vain – d’interdire à Jean-Luc Mélenchon de participer à la marche blanche organisée mercredi soir en mémoire de Mireille Knoll, cette femme de 85 ans victime d’un crime antisémite. C’est une faute morale d’une extrême gravité. Et cela pour plusieurs raisons que l’on a honte de devoir lui rappeler ici. D’abord parce qu’en cet instant, le principe même d’une discrimination est détestable. Tout comme le scandaleux amalgame qu’il pratique entre la France insoumise et le Front national, c’est-à-dire entre un mouvement et un homme irréprochables dans le combat contre l’antisémitisme, et un parti d’extrême droite dont le fondateur s’est rendu plusieurs fois coupable de ce délit.

Mais une autre raison suscite notre indignation, et nous inquiète. Le président du Crif croit pouvoir justifier sa sentence par les positions critiques exprimées par la France insoumise et son leader à l’encontre de la politique israélienne. Ce faisant, il n’hésite pas à créer la confusion à l’heure d’une manifestation qui eût exigé une totale clarté. En même temps que d’interdire à ceux qui lui déplaisent le droit de dénoncer un crime antisémite, M. Kalifat veut interdire toute critique de la politique israélienne. Il veut utiliser la circonstance tragique de la mort d’une femme qui, terrible ironie de l’histoire, avait échappé à la rafle du Vel d’Hiv, pour réduire au silence les opposants à la politique du gouvernement israélien. Est-il conscient qu’en agissant ainsi, il prend le risque d’identifier la communauté juive de France à une politique coloniale menée par le gouvernement le plus à droite qu’ait jamais connu Israël ? M. Kalifat devrait mesurer que la confusion qu’il entretient est le plus redoutable ferment d’antisémitisme. On se doit de lui rappeler ici qu’il préside le Crif, c’est-à-dire une association qui n’a pas l’exclusivité de la représentation des juifs de France, et qui, en tout état de cause, n’a pas vocation à défendre une politique israélienne précisément coupable de racisme.

Monde Société
Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

« Pour Trump, les États-Unis sont souverains car puissants et non du fait du droit international »
Vidéo 17 janvier 2025

« Pour Trump, les États-Unis sont souverains car puissants et non du fait du droit international »

Alors que Donald Trump deviendra le 47e président des Etats-Unis le 20 janvier, Bertrand Badie, politiste spécialiste des relations internationales, est l’invité de « La Midinale » pour nous parler des ruptures et des continuités inquiétantes que cela pourrait impliquer pour le monde.
Par Pablo Pillaud-Vivien
Avec Donald Trump, les perspectives enterrées d’un État social
Récit 17 janvier 2025 abonné·es

Avec Donald Trump, les perspectives enterrées d’un État social

Donald Trump a promis de couper dans les dépenses publiques, voire de supprimer certains ministères. Les conséquences se feront surtout ressentir chez les plus précaires.
Par Edward Maille
Trump : vers une démondialisation agressive et dangereuse
Analyse 17 janvier 2025

Trump : vers une démondialisation agressive et dangereuse

Les règles économiques et commerciales de la mondialisation ayant dominé les 50 dernières années ont déjà été fortement mises en cause. Mais l’investiture de Donald Trump va marquer une nouvelle étape. Les échanges économiques s’annoncent chaotiques, agressifs et l’objet ultime de la politique.
Par Louis Mollier-Sabet
La journaliste Ariane Lavrilleux échappe à une mise en examen
Presse 16 janvier 2025

La journaliste Ariane Lavrilleux échappe à une mise en examen

Ce 17 janvier, l’investigatrice, convoquée au tribunal de Paris, a finalement évité des poursuites pour avoir révélé des secrets de la défense nationale. 110 organisations appellent à un renforcement du secret des sources pour la presse.
Par Maxime Sirvins