Olivier Faure : l’homme du milieu
Olivier Faure vient d’être élu premier secrétaire du Parti socialiste. Voici le portrait que nous en faisions fin janvier.
Dans la même journée, il a engrangé le soutien de la très anti-Valls Martine Aubry et du très vallsiste Philippe Doucet. Un grand écart qui n’effraie pas Olivier Faure, au contraire. Le président du groupe Nouvelle Gauche à l’Assemblée nationale, candidat à la direction du Parti socialiste après que sa bonne camarade Najat Vallaud-Belkacem a jeté l’éponge, est catégorique : une fois « président (sic) du PS », il saura « dépasser les clivages anciens » et faire « repartir [le parti] sur une autre histoire ». L’aile droite, l’aile gauche, les querelles entre « frondeurs » et « réalistes »… Tout ça, c’était avant. Lui, qui sait que le PS se prend au centre, sera l’homme de la réconciliation. Vendre aux militants inquiets le rêve que la crise mortifère qui secoue le parti ne sera bientôt qu’un lointain souvenir : la stratégie semble, pour l’instant, gagnante. Le grand favori de la course ne compte plus ses soutiens, même sur le versant le plus à gauche du parti : Stéphane Troussel, Valérie Rabault, Matthias Fekl…
Olivier Faure, pile 50 ans cette année, look de gendre idéal, est encore un inconnu pour qui ne passe pas son temps à regarder les plateaux de La Chaîne parlementaire. Mais il a tout de l’apparatchik à l’ancienne. Et d’abord un CV taillé pour plaire aux légitimistes, majoritaires dans le parti. L’actuel patron des 30 députés socialistes (et apparentés), entré au PS à 16 ans, a fait rapidement carrière dans les arcanes de la gauche gouvernementale. Jeune rocardien, il devient un fidèle de Jean-Marc Ayrault – une rareté – puis passe du cabinet de la ministre du Travail Aubry à celui de François Hollande à Solferino. « J’ai bossé pendant sept ans à ses côtés, mais François ne connaît pas grand-chose de moi », confie-t-il. Au point que l’ex-premier secrétaire sera l’un des derniers à savoir que son plus proche collaborateur signe, sous pseudo, des bandes dessinées relatant par le menu les vicissitudes du petit monde solférinien. Dont la célèbre Ségo, François, papa et moi, sur la terrible campagne de Ségolène Royal, qu’il a soutenue en 2007…
Alors, depuis, Olivier Faure n’a plus que le « compromis » à la bouche. Rien à voir avec la « synthèse molle » à la Hollande ou le « en même temps » macronien, jure celui qui a signé, aux côtés de Martine Aubry et de Gérard Collomb, la très fourre-tout « motion A » au congrès de Poitiers, en 2005 : « Je veux souligner les convergences et ne pas nourrir les débats qui nous divisent artificiellement. La social-démocratie, ça ne veut pas dire qu’on est mou du genou, mais qu’on veut dépasser les antagonismes. » C’est lui, rappelle-t-il à dessein, qui a tenté, mais en vain, de proposer un « compromis » sur la loi travail au printemps 2016. Et s’il s’est opposé à la déchéance de nationalité, c’était, au fond, surtout pour le bien du parti : « Cette histoire nous a fait perdre la gauche intellectuelle, la gauche morale et la gauche issue de l’immigration. »
Un peu grondeur, mais pas frondeur, Olivier Faure a quand même voté Valls à la primaire de 2017. Reste qu’il apparaît aujourd’hui, par un effet de contraste, moins « hollandais » que l’ex-ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll, lui aussi dans la course. D’ailleurs, une fois premier secrétaire, c’est promis, il fera l’inventaire du quinquennat. Une grande convention pour analyser ce qui a échoué, « c’est nécessaire, si on veut repartir sur de bonnes bases ».
Lui « président » du PS, il fera du mouvement de Jaurès un « parti plateforme » qui permettra à tous les militants, et même pourquoi pas aux simples sympathisants, de participer aux prises de décision. Un « parti 2.0 », « décentralisé », qui produira des Mooc, des formations en ligne pour les militants et le grand public, afin de pouvoir mener des « débats exigeants ». Par exemple, sur les « nouvelles aliénations aux écrans » ou « la compatibilité entre la transition énergétique et la question sociale ».
Le nouveau siège, Olivier Faure l’imagine à Paris, rive gauche. Il devra être clair, moderne et incarner, par l’agencement de l’espace, ce nouvel esprit du socialisme. Pour tenter de faire oublier la rue de Solferino et tous ses labyrinthes.