Scènes de violences policières inhabituelles dans les universités
Les universités de Nanterre et Lille ont été marquées ce lundi par des interventions policières. Des scènes encore inimaginables il y a quelques semaines.
Ce lundi, en fin d’après-midi, les quelques 200 étudiants et enseignants de l’université de Nanterre réunis devant le bâtiment de la présidence, pour demander des explications, peinent à reprendre leurs esprits. Ils sortent juste, émoussés, de plusieurs heures de face à face, dans les locaux de l’université, avec un imposant escadron de CRS.
La mobilisation contre la loi ORE démarre timidement, depuis des semaines, dans cette université de 35 000 étudiants, où s’est tenue ce week-end la coordination nationale du mouvement étudiant. Mais la présidence de l’université a décidé de faire évacuer par la force un groupe d’environ 200 étudiants qui tenait, en début d’après-midi, une assemblée générale improvisée.
Pendant une heure et demie environ, les CRS ont extrait par la force et par petits groupes les étudiants, pacifiques, selon les témoignages recueillis sur place en fin de journée. Plus tôt dans la journée une « trentaine d’individus extérieurs à l’université ont pénétré par effraction dans un bâtiment », a justifié à l’AFP le président de l’établissement, Jean-François Balaudé.
La scène, inouïe pour un mouvement étudiant, a été filmée par plusieurs témoins, que Politis a pu contacter.
Nous sommes extrêmement choqués du recours à une intervention policière (gendarmerie et CRS) à l’intérieur des bâtiments de l’université pour déloger et interpeller des étudiants (ce qui est à notre connaissance inédit dans l’histoire de l’université de Nanterre). (…) Nous exigeons que soit respecté le droit de se réunir, de débattre et de manifester dans l’université, lieu de formation et d’émancipation. Nous demandons la libération immédiate des étudiants arrêtés.
Sept personnes ont été interpellées pour « rébellion », a appris France info auprès de la préfecture de police de Paris. « Ils ciblaient clairement des éléments importants du mouvement », s’indigne Victor, doctorant à Nanterre, qui a assisté à la scène avec une quinzaine de professeurs. Une personne a également été évacuée par les pompiers.
Des personnels de l’université ont publié ce lundi soir un communiqué dénonçant des « violences policières inacceptables et sidérantes » :
À Lille, les CRS encadrent les partiels
Des témoignages similaires nous parviennent de l’université Lille 2, ce 9 avril, où a été mis en place « un dispositif extrêmement sécuritaire pour les 15 jours que durent les examens », selon Thomas Alam, enseignant en science politique en grève contre la sélection à l’université :
Les examens se sont déroulés dans une ambiance assez étrange. Les CRS étaient présents dans le hall où se trouvent les amphis dans lesquels les étudiants passaient leurs écrits.
Un rassemblement, à la mi-journée, regroupant des étudiants et des cheminots, à l’université, a essuyé des gaz lacrymogènes et une charge de CRS, selon le témoignage de ce professeur et d’un étudiant présent sur place. « Des CRS qui surveillent la tenue des examens, on n’a jamais vu ça dans une université. Je suis tombé des nues au point de me sentir mal », s’indigne Thomas Alam.
« La présence des forces de l’ordre dans l’université risque de mettre le feu aux poudres », estime Valentin, étudiant en L3 de science politique, ni militant ni mobilisé, bien qu’opposé à la sélection à l’université. « Ce n’est pas le rôle des CRS de surveiller les facs. »
Ces interventions s’ajoutent à un climat déjà extrêmement tendu dans les universités, où le début de mouvement contre la sélection à l’université fait face à des attaques de groupes violents d’extrême droite et à une forte pression policière.
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