Frustration aux Champs, fête à l’Élysée
Dix minutes devant les supporters, toute la soirée avec Emmanuel Macron : l’équipe de France de football a préféré le palais présidentiel à la liesse populaire.
La fête n’est pas gâchée, mais elle aura été moins folle. Lundi 16 juillet, vingt-quatre heures après leur triomphe face à la Croatie (4-2) en finale de la Coupe du monde de football, les joueurs de l’équipe de France étaient attendus par leurs supporters sur l’avenue des Champs-Élysées. Près de 300 000 personnes venues de toute la France, massées derrière plus d’un kilomètre de barrières de sécurité, espéraient entrer en communion avec leurs héros.
L’attente fut longue. Les premiers arrivés ont passé plus de cinq heures sous le soleil, pas découragés par les retards annoncés de l’avion des Bleus – atterrissage initialement prévu à 15h55, finalement effectué une heure plus tard. Il a ensuite fallu se frayer un chemin dans l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle puis sur la route, où des milliers de personnes étaient postées pour accueillir les joueurs. Le bus à impériale a finalement tourné sur « la plus belle avenue du monde » à 19h19, avec plus de deux heures de retard.
Le moment promettait d’être historique. Les photos qui l’ont immortalisé sont effectivement glorieuses. Mais chez les fans, l’instant laissera un goût amer. Il faut bien parler d’« instant », car le défilé n’a duré qu’une dizaine de minutes – alors qu’une parade d’une heure était prévue. Pour les supporters, cela correspond à une dizaine de secondes, le temps d’apercevoir les joueurs à quelques mètres d’eux, entre les fumigènes et les téléphones brandis. « Vous croyez qu’ils vont revenir ? C’est pas possible que ça finisse comme ça », demande Maxime alors que le bus n’est plus dans son champ de vision. « C’est nul, ils se filmaient avec leurs téléphones au lieu de nous regarder et il y avait des policiers partout », se désole une autre personne à ses côtés.
Pas de Crillon pour les Bleus
L’image passe d’autant plus mal que peu après avoir terminé son défilé, l’équipe de France était accueillie au palais présidentiel par Emmanuel Macron. Le perron de l’Élysée plutôt que la liesse populaire des Champs : beaucoup de fans en restent interloqués. « On ne peut pas leur en vouloir parce qu’ils nous ont donné du bonheur, et qu’à l’Élysée ils ont rencontré beaucoup de jeunes. Mais ils auraient aussi pu passer plus de temps avec nous… », soupire un jeune supporter de retour des Champs.
Le soir, des milliers de personnes s’étaient rassemblées devant l’hôtel Crillon, où la tradition voulait que les Bleus viennent adresser un ultime salut. Ils devaient aussi y dîner, mais sont finalement restés au palais. « Les joueurs sont à l’Élysée et y restent pour la soirée. Aucun rendez-vous dans un grand hôtel ou palace parisien ne suivra ce rendez-vous », indiquait dans la soirée le compte Twitter @equipedefrance. « La dislocation du groupe France a eu lieu à la sortie de l’Élysée, les joueurs sont en vacances », a ensuite expliqué à l’AFP Philippe Tournon, chef de presse des Bleus.
En 1998, les Bleus victorieux étaient restés plus de trois heures sur les Champs et aux alentours, devant un demi-million de personnes si proches du bus qu’elles pouvaient le toucher. Ce lundi, ce moment « historique » était dans toutes les têtes. Il était, certes, impossible que l’histoire se répète, notamment pour des raisons de sécurité. Mais de là à ce que le défilé soit aussi court et frustrant, il y avait sans doute la possibilité de trouver un entre-deux.
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