Irlande : la revanche des femmes
Le 25 mai, deux Irlandais sur trois ont exprimé un oui massif à la libéralisation de l’IVG.
dans l’hebdo N° 1525 Acheter ce numéro
Longtemps lauréate du prix du pays le plus rétrograde pour les droits des femmes, l’Irlande a cédé sa place à… l’Irlande du Nord, où l’IVG reste quasiment interdite. Le 25 mai, deux Irlandais sur trois ont exprimé un oui massif à la libéralisation de l’IVG, soit la même proportion qui, trente-cinq ans plus tôt, dans un autre référendum, avait constitutionnalisé son bannissement. Le pays avait déjà attendu 1996 pour autoriser le divorce… Les Irlandaises reviennent de loin.
L’emprise de l’Église catholique a longtemps serré le pays dans un carcan rétrograde, où l’identité nationale se confondait avec un papisme militant. La fin du conflit nord-irlandais (1998) a apaisé les tensions nationalistes, mais des scandales ont aussi miné la position des prélats et des prêtres. Les couvents de la Madeleine (« Magdalene Laundries »), d’abord, où des milliers de jeunes femmes, sous le prétexte de « mœurs légères », furent enfermées, soumises au travail forcé, encadrées par des nonnes, jusqu’en 1996. Puis l’ampleur des crimes pédophiles du clergé, couverts par la hiérarchie.
Depuis 2017, l’Irlande est dirigée par un Premier ministre de centre-droit, gay et de père indien. Mais le référendum ne lui doit rien : il a été initié par des citoyens (lire Politis n° 1503, du 17 mai). La campagne fut un exemple de démocratie, elle a révélé combien les élites politiques et religieuses étaient dépassées par la société. La parole des femmes a été libérée, leur souffrance exposée, et in fine les hommes autant que les femmes ont dit oui.