Maurel quitte (enfin) le Parti socialiste
Après des semaines à entretenir le suspense sur son départ du PS, l’eurodéputé a sauté le pas, vers la France insoumise.
Insoutenable. Oui, insoutenable suspense… Depuis plusieurs semaines (voire quelques mois), il laissait planer l’incertitude sur son départ du Parti socialiste. Emmanuel Maurel s’est enfin décidé à annoncer qu’il le quittait ce vendredi 12 octobre, dans une interview au Monde. « Mieux vaut partir plutôt que de se mentir à soi-même et aux autres », explique le tenant de l’aile gauche du parti. Une référence aux errances que connaît le PS depuis 18 mois. Comme tous ceux qui l’ont fait avant lui, Emmanuel Maurel reproche au PS son manque d’ouverture aux autres formations de gauche – « Je n’ai pas supporté que les principaux dirigeants du PS accréditent la thèse des “deux gauches irréconciliables” » – et sans surprise, ce refus de dresser un inventaire de son action au gouvernement : « Une politique qui n’a pas contribué à l’amélioration des conditions de vie matérielles et morales des gens qu’ils étaient censés représenter. »
Pire encore, attaque l’eurodéputé : « Non seulement ils n’ont pas tiré les leçons du quinquennat calamiteux de François Hollande, mais certains continuent de se réfugier dans le déni jusqu’à voir dans son principal instigateur un potentiel sauveur ! »_ Stéphane Le Foll, ancien ministre de l’Agriculture, ami de l’ancien président de la République et membre du bureau national du parti, saisira la référence. Les deux hommes ne s’étaient-ils pas écharpés au dernier bureau national destiné à établir un document de travail pour les élections européennes ?
Vers la France insoumise
Et, assure-t-il, il ne part pas seul. Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice de Paris, compte elle aussi annoncer son départ dans les jours à venir. À la différence de la sénatrice du Val-de-Marne, Sophie Taillé-Poilan, qui a rejoint Génération·s, les regards d’Emmanuel Maurel et de Marie-Noëlle Lienemann convergent vers la France insoumise. « Je n’ai jamais cessé d’échanger avec Jean-Luc Mélenchon », avouait sans détours Emmanuel Maurel à l’université d’été du mouvement, ne cachant déjà plus les liens de proximité les unissant. Sur la liste pour les élections européennes des insoumis, la place est réservée depuis longtemps. « Il est évident que si Maurel nous rejoint, il sera à une position éligible », confiait à l’époque un membre du comité électoral. « Je pense avoir un bon bilan de député européen et j’ai envie de continuer à mener les combats qui me tiennent à cœur », confirme l’intéressé au Monde.
Comment justifier alors d’avoir tant attendu pour se séparer du PS ? Au Monde, Emmanuel Maurel affirme : « Je suis au PS depuis plus de vingt-cinq ans. Je suis attaché à ses militants, à ses traditions et à ses rites. J’ai consulté, réfléchi… On pouvait attendre de la nouvelle direction qu’elle incarne le sursaut. Ce n’est pas le cas. » Mais derrière le discours se cache un aveu d’échec. Le leader de l’aile gauche du PS n’est pas parvenu à faire pencher la balance en sa faveur. Tant pour une désignation comme tête de liste pour les européennes que sur la ligne du PS, errant toujours sur le chemin de crête de la « synthèse », entre maurelistes et hollandistes. Fier de 20 % des votes à sa candidature pour le poste de premier secrétaire en mars 2018, Emmanuel Maurel promet « une scission » du PS. « Aujourd’hui, je ne pars pas seul mais avec de très nombreux militants, des centaines de cadres et d’élus sur l’ensemble du territoire », assure-t-il.
Au sein du parti, ce départ ne fait pourtant pas plus d’effet que ça. Rares sont les cadres à s’inquiéter de cette « fuite des cerveaux de gauche » promise. « Tous les membres de son équipe ne le suivront pas, assure l’un d’eux, pas plus que les militants. ». De quoi faire résonner dans les couloirs du désormais désert siège de Solférino une phrase de Jacques Chirac : ça leur en touche une…
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