Aide aux migrants : les 7 de Briançon risquent cher
Les 7 de Briançon risquent de lourdes peines allant jusqu’à dix ans de prison et 750 000 euros d’amende, pour « aide à l’entrée sur le territoire français d’étrangers en situation irrégulière, le tout en bande organisée ».
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Théo, Bastien, Eleonora, Mathieu, Juan, Lisa et Benoît. Quatre Français, deux Suisses, une Italienne. Ils ont entre 25 et 50 ans, certains sont encore étudiants, d’autres sont menuisiers, charpentiers. On les appelle « les 7 de Briançon ». Les 3 + 4 exactement, car les trois premiers ont été mis en garde à vue le 22 avril. Il leur est reproché « l’aide à l’entrée sur le territoire français d’étrangers en situation irrégulière, le tout en bande organisée ». Ce jour-là, Théo, Bastien et Eleonora participaient avec 150 personnes à une manifestation en réaction à une opération de blocage anti-migrants du groupe Génération identitaire, la veille, au col de l’Échelle (1 762 m) dans les Alpes. Les trois militants ont marché de Clavière (Italie) à Briançon (Hautes-Alpes) avec une vingtaine de migrants. Leur garde à vue a duré onze jours. Leur contrôle judiciaire a été levé le 31 mai. Présents le 22 avril, les quatre autres ont été mis en garde à vue plus tard, le 17 juillet. Les sept sont convoqués, dans le cadre de deux enquêtes, au tribunal correctionnel de Gap, ce 8 novembre.[—]
Le délit de solidarité a été contré par la consécration du principe de fraternité par le Conseil constitutionnel, le 6 juillet. Mais l’aide à l’entrée sur le territoire français reste répréhensible. Les 7 de Briançon risquent de lourdes peines allant jusqu’à dix ans de prison et 750 000 euros d’amende. Ils ne se considèrent pas comme des héros, mais comme des gens ordinaires. Certains refusent d’apparaître. De voir publier leur photo. Ils redoutent la police, et les pressions de Génération identitaire. La mobilisation citoyenne contre ce procès est assez forte : dans le prolongement de la soirée de soutien aux migrants à Paris le 25 octobre, à l’appel de plusieurs journaux dont Regards, Politis et Mediapart (lire Politis n° 1525), une soirée de soutien aux 7 de Briançon organisée à La Générale, à Paris, le 3 octobre a permis de rassembler plus de 8 000 euros pour leur défense. « Ce dossier est symbolique de la violence qui s’exerce sur le mouvement social et les gens qui se mobilisent, rappelait Olivier Milleron, de la Fanfare invisible lors de la soirée au 104. Cela laisse présager de la violence qui frappe les migrants tous les jours. […] La solidarité est devenue un délit. Une manifestation devient une bande organisée. » Et le militant musicien de conclure : « La justice doit être rendue au nom du peuple français. Nous sommes le peuple, il est important de dire que ça n’est pas possible que ces gens soient condamnés. » Les membres de Génération identitaire n’ont pas été inquiétés.
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