Nicole Belloubet justifie la suppression de la subvention au Genepi
La garde des Sceaux a estimé sur France Inter que l’association d’aide aux détenus développait des thèses « très hostiles à la politique publique » conduite par le gouvernement.
Voilà une semaine, on apprenait que le Genepi, association étudiante tournée vers l’aide aux détenus et le décloisonnement des institutions carcérales, voyait sa subvention de 50 000 euros annuels supprimée par la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP), malgré un partenariat national noué il y a quarante-deux ans. _« Après plusieurs mois d’absence de dialogue, dénonçait le Genepi, cette convention a été unilatéralement rompue le 20 septembre. » Une décision qui bien évidemment remet en cause la capacité de l’association à poursuivre ses activités et menace même sa raison d’être. Motif principal de la DAP : l’association, a depuis quelques années, réduit très largement la voilure de ses heures d’enseignement en prison.
Invitée dans la matinale de France Inter, la garde des Sceaux a dû revenir sur le sujet, interpellée par une auditrice, qui demandait des explications et si cette décision brutale était en accord avec une logique de réinsertion. Réponse sèche de Nicole Belloubet :
Alors même que le Genepi avait pour missions de faire un nombre d’heures important d’enseignement en détention, ce nombre d’heures a considérablement diminué. Il est passé de 12 000 à 5 000 heures en quelques années, en deux ou trois ans. Et par ailleurs, le Genepi développait des thèses qui sont très hostiles à la politique publique que nous conduisons. Autrement dit, des thèses qui allaient même jusqu’à lutter contre la mise en place de régimes de confiance que nous avons élaborés dans un certain nombre de prisons. Des régimes de confiance qui permettent aux détenus d’être plus autonomes, de circuler librement dans une zone de l’établissement en détention, d’accomplir un certain nombre d’activités, etc. Donc ce n’était plus une politique de partenariat sur les ambitions que nous avions, mais une politique au contraire d’opposition quasiment frontale et permanente. Donc, j’ai pris une décision qui est de supprimer la subvention. Mais, bien entendu, j’autorise toujours l’accès du Genepi aux établissements pénitentiaires.
« J’ai pris une décision qui est de supprimer la subvention. » On pourra faire difficilement plus démocratique comme réponse ! Circulez ! Outre leur droit de libre expression clairement bafoué, les bénévoles du Genepi sauront apprécier le « bien entendu, j’autorise toujours l’accès du Genepi aux établissements pénitentiaires » : cela leur est de plus en plus difficile. Depuis la suspension de cette convention, plusieurs bénévoles ont vu leurs actions annulées par l’administration pénitentiaire. C’est le cas, rapporte l’association sur son site, pour le centre pénitentiaire sud francilien (Réau, 77), la maison centrale de Poissy (78), le centre pénitentiaire de Fresnes (94). Diverses interventions en détention ont été également suspendues dans les régions Haut-de-France, Rhône-Alpes-Auvergne et menacées en Provence-Alpes-Côte-d’Azur.
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