Raphaël Glucksmann : « Sauver la démocratie libérale »

L’essayiste Raphaël Glucksmann lance Place publique, un mouvement politique, et publie un essai sur « l’impasse individualiste ». Il propose ici un bilan de l’échec de la gauche réformiste et tente de dégager une vision rassembleuse contre le néolibéralisme dominant.

Olivier Doubre  et  Agathe Mercante  • 7 novembre 2018 abonnés
Raphaël Glucksmann : « Sauver la démocratie libérale »
© photos : Julien Mignot ; Constant FormÈ-BËcherat/AFP

Raphaël Glucksmann a des envies de politique. Adepte de la confrontation des idées, il dit vouloir s’appuyer sur des mobilisations citoyennes et des expertises locales, pour mieux « refonder » la gauche. Mais avant, il s’agit d’en reconnaître l’« échec », qu’il dit être aussi le sien. Et qui, selon l’essayiste, « est grandiose ». Car, au moment où les forces nationalistes et autres démagogues ont le vent en poupe et remportent des victoires électorales, « le logiciel néolibéral nous mène dans l’abîme », souligne-t-il. Pour lui, l’accroissement des inégalités et l’atomisation sociale sont le vrai terreau de l’extrême droite.

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Pour autant, dénoncer l’extrême droite comme fascisante et raciste ne suffit pas à la faire reculer. Raphaël Glucksmann s’est donc attelé, dans un essai fouillé, à comprendre cette « impasse individualiste » qui caractérise notre époque et ces « enfants du vide » qu’elle a engendrés. Il a aussi œuvré au lancement d’un mouvement politique, Place publique, visant à la reconstruction d’une gauche démocratique, écologiste, européenne et de transformation sociale. Sans commencer par les listes de candidats et les « combinaisons » électorales.

Votre livre est d’abord un plaidoyer pour la démocratie libérale et des pistes pour la sauver. Quel est votre diagnostic en ce sens ?

Raphaël Glucksmann : J’essaie d’avoir un rapport non dogmatique à la politique : je pense que les idées dépendent des moments dans lesquels on les exprime. Ainsi, le libéralisme en soi n’est pas un gros mot : être libéral au XVIIIe siècle pour faire respecter les sphères privées par rapport aux Églises est tout à fait louable ; être libéral à Moscou ou à Pékin en 1970, c’est même héroïque ; enfin, être libéral à Paris ou à San Francisco en 2018, c’est très différent. Le libéralisme, qui avait été pensé au départ comme un antidote aux dogmes, est devenu en soi un dogme et une religion politiques. C’est un problème de fond pour la démocratie libérale. Car celle-ci est l’alliance de deux pôles fortement contradictoires : d’un côté, le pôle démocratie, fondé sur une vision holistique de la société, partant du tout, du peuple souverain ; de l’autre, le pôle libéral, qui sanctuarise les parties, où chaque individu, chaque communauté, chaque entreprise a le droit de considérer un horizon pour soi. C’est la rencontre des deux qui fait vivre la démocratie libérale. Or, ce qui s’est produit au cours des trente ou quarante dernières années, c’est que le pôle libéral a complètement colonisé le pôle démocratie, et la relation entre les deux a cessé d’être dialectique pour dériver du côté libéral. Aussi, la perception de la démocratie, le sentiment d’appartenance à un peuple maîtrisant son destin, a disparu.

C’est là, à mon avis, le cœur de la crise ­d’aujourd’hui et le moteur du succès des différentes formations d’extrême droite, comme au Brésil dernièrement, partout en Europe et dans beaucoup d’anciennes démocraties libérales. Tout l’enjeu est donc de revitaliser le pôle démocratie, mais pas dans la perspective qui est celle des souverainistes ou des populistes. Je m’interroge ainsi : pourquoi Matteo Salvini, cela fonctionne-t-il ? On ne peut pas se contenter de dire que c’est un facho. On voit que la revanche du peuple, voire de la démocratie, passe d’une certaine façon par un Matteo Salvini. C’est bien l’immense problème qui nous est posé : le retour du politique ou le triomphe du peuple est incarné par Matteo Salvini. Et non par je ne sais quelle organisation de gauche !

Comme vous vous situez dans une perspective de gauche, n’avez-vous pas tendance, sinon à oublier, du moins à négliger le fait que la démocratie libérale a sans doute montré ses limites par une trop grande soumission au capitalisme ? Quid de l’égalité, principe fondateur de la gauche ?

Je crois que la démocratie libérale n’est rien en tant que telle. C’est un système indéfini. Quand le Front populaire était au pouvoir, la démocratie restait libérale en France parce que demeuraient les règles de la propriété privée, le fait qu’un propriétaire de journal avait le droit de critiquer vertement le gouvernement, jusqu’à traiter Léon Blum de « sale juif », même si c’était odieux. Néanmoins, cette démocratie libérale cherchait à devenir plus égalitaire. Aussi, ce qui lui donne un sens, c’est juste un cadre : ce sont les rapports de force politiques. Si la gauche abandonne ou délaisse la question de l’égalité, de la justice sociale, et plus largement l’horizon de transformation de la société qui, selon moi, fonde l’idée même de gauche, la démocratie libérale abandonne dans le même temps son pôle démocratique.

Pour ma part, je ne cherche pas simplement à sauver la démocratie libérale dans sa forme actuelle. Mais on n’échappera pas à une forme hybride mêlant les deux pôles : la démocratie, qui signifie quête d’égalité, de justice sociale, mais aussi de souveraineté, et une forme de libéralisme politique que l’on n’a pas à jeter aux orties, car l’histoire de la gauche au XXe siècle, nous le savons, a été jalonnée d’expériences où la gauche avait décidé de ne pas se préoccuper de ce pôle-là, avec les catastrophes que l’on sait.

Aussi suis-je favorable au fait de revenir à une ambition de transformation sociale, mais dans le cadre de la démocratie libérale. Cela a déjà été fait dans l’histoire, notamment depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu’aux années 1980, période durant laquelle nous avons vécu dans des systèmes qui n’étaient certes pas parfaits mais étaient socialement beaucoup plus équilibrés qu’aujourd’hui, où les inégalités avaient tendance à se réduire au lieu de s’accroître. Tout cela dans le cadre de la démocratie libérale. L’enjeu est donc de réaffirmer en son sein un pôle démocratique fort.

Dans votre volonté de rééquilibrer les pôles, ne négligez-vous pas la question sociale ?

Je ne nie absolument pas le caractère crucial des inégalités ou de la question sociale. Cependant, je pense que la façon dont cette question est posée aujourd’hui ne fonctionne pas. Et je pense que, pour fonctionner, elle doit être intégrée à une question plus vaste, qui est celle de la transition écologique ; c’est celle-ci qui va réhabiliter de manière forte la notion de pouvoirs publics, afin qu’on puisse ensuite s’atteler aux enjeux de transformation sociale.

Or, pour aller contre des intérêts particuliers, il faut relégitimer l’existence même de la sphère publique et lui permettre d’intervenir dans la transformation sociale. Aujourd’hui, je ne vois aucun gouvernement qui parvienne à mobiliser à ce point sa population pour réellement transformer son modèle social. C’est bien l’immense défi qui se trouve face à nous. Et, malheureusement, le seul que je vois capable d’une telle mobilisation, c’est Salvini !

Dans votre livre, vous critiquez le clivage peuple/élite, cher au « populisme de gauche » hérité des écrits de Chantal Mouffe et d’Ernesto Laclau. Pourtant, ne faites-vous pas vôtre ce clivage lorsque vous dénoncez les élites qui gouvernent en fonction de leurs seuls intérêts ?

Il y a bien sûr un clivage social, des classes sociales. Cela a été une erreur de penser que, parce qu’il y a eu le goulag, on devait invalider l’ensemble des grilles d’analyse marxiennes. Les classes sociales ont même tendance à se renforcer plutôt qu’à s’effacer ! Et il y a une élite qui, en outre, a tendance à l’endogamie en se coupant financièrement (et même physiquement, de par ses lieux d’habitation) du reste de la population. C’est un fait. Mais là où je ne suis pas strictement marxiste, c’est que je ne pense pas que l’infrastructure sociale détermine de manière logique et nécessaire l’offre politique.

Bien entendu, il y a une élite et le peuple ; mais l’offre politique ne peut pas être « le » peuple. Car le peuple est constitué de la confrontation de différentes visions politiques. Et le peuple contre l’élite signifierait que les 99 % soient tous d’accord entre eux et aient une même vision du monde. Ce qui est complètement faux ! Si l’on s’en tient à une analyse sociologique ou socio-économique, cela ne me pose aucun problème. Mais on ne saurait la considérer comme une vision politique. C’est un fait qu’1 % de la population s’enrichit de façon scandaleuse. Ensuite, parmi les 99 %, certains s’enrichissent plus ou moins et comptent in fine parmi les bénéficiaires de cette société. Et il y a tous les autres, avec beaucoup de situations différentes.

Mais votre critique du clivage peuple/élite, trop réducteur, ne signifie pas que vous rejetez le clivage droite/gauche…

Je crois pour ma part à la politique : c’est bien une vision qui doit s’exprimer. Le clivage droite/gauche transcende les classes sociales. Dans le même parti, il pouvait y avoir un chercheur en biologie habitant le Ve arrondissement de Paris et un ouvrier de Lorraine, parce qu’ils s’accordaient sur une vision politique. Je ne crois pas à l’essentialisme politique, mais que tout est le produit d’une vision. Gauche et droite sont des visions qui, auparavant, s’affrontaient. C’est ce qui fait vivre la démocratie.

Le grand problème de la vision populiste est justement là. Et de savoir qui sera le représentant du peuple. Est-ce moi ? Un autre ? Pourquoi ? Je partage entièrement, chez Chantal Mouffe et Ernesto Laclau, l’idée de « l’illusion du consensus (1) » – illusion dangereuse pour la démocratie – et celle de l’antagonisme en politique. Chantal Mouffe a raison sur ce point : il faut vraiment rétablir une forme d’antagonisme en politique, sinon la vie démocratique cesse de fonctionner. Mais, là où je suis en désaccord profond avec elle, c’est que le populisme en tant que tel est tellement vague idéologiquement et conceptuellement que ses contradictions ou ambiguïtés culturelles, idéologiques, sociales ou sociétales ne peuvent se résoudre qu’avec l’adhésion à la figure d’un leader charismatique ou du chef révolutionnaire. D’ailleurs – et c’est là où Chantal Mouffe est néanmoins une grande penseuse –, cela se vérifie dans les faits, au sein des formations politiques qui se réclament de sa pensée.

La gauche ne sera jamais univoque et a toujours été éclatée, mais je préfère qu’elle soit fondée sur une vision politique que sur une simple prédestination sociologique.

Vous écrivez que la gauche est dans un « état de faiblesse idéologique avancée ». Aujourd’hui, quel bilan tirez-vous des dernières élections et des tentatives de reconstruction depuis ?

Évidemment, le premier bilan est la défaite totale de ce qui était censé être la gauche de gouvernement. Mais ceci dès 2012, moment où cette défaite était en quelque sorte déjà actée faute de projet. Aujourd’hui, on entend beaucoup dire que c’est la faute de François Hollande et de lui seul. Or, c’était déjà là avant lui et cela remonte à plus loin encore. Il faudrait même se souvenir du second septennat de Mitterrand. Nous sommes véritablement arrivés à la fin d’un cycle.

Ensuite, il y a bien sûr des analyses micro­politiques, avec ceux qui pensent que la cause de cette défaite serait davantage la « trahison » de Valls, le coup de poignard d’Untel ou le revirement d’un autre… Ceux qui soutiennent ces explications vivent dans un mythe : la fin de cycle dont je parle est beaucoup plus profonde que les péripéties qui ont jalonné la campagne de Benoît Hamon. Face à cela, il y a eu l’émergence de La France insoumise (LFI). Contrairement à ce que beaucoup pensent, j’ai un point de vue plutôt nuancé sur ce mouvement, et bien moins nuancé sur son leader. C’est pour moi, de loin, le mouvement qui a le plus travaillé sur les idées. Je ne crois pas avoir vu une quantité et une qualité équivalentes sur le fond chez les autres formations. Par exemple, la conversion de Mélenchon à l’écologie a été expliquée clairement, en profondeur. Par ailleurs, LFI a su créer une vraie dynamique, Mélenchon étant le meilleur rhéteur de la politique française, sa campagne a fort bien fonctionné.

Pourquoi alors ne pas rejoindre LFI ?

Tout d’abord en raison d’un problème de fond. Je ne sais toujours pas si ses membres ont choisi entre ces deux options : refonder une vision internationaliste, progressiste, humaniste et écolo, ou épouser la vague souverainiste. Ce débat n’est pas tranché, ou alors, quand cela semble le cas, il va dans un sens qui m’inquiète.

Le même débat s’exprime d’ailleurs au sein de Podemos, en Espagne, certes de manière moins aiguë, car, dans tous les ensembles de cette « mouvance », c’est d’abord le leader charismatique qui décide. Or, Pablo Iglesias, pour le dire rapidement, a choisi de reconstruire d’abord la gauche. C’est une autre des raisons pour lesquelles je ne suis pas à LFI : il est quand même tout à fait paradoxal pour cet espace politique-là, ce type de mouvement-là, que tout se décide in fine de manière verticale et centralisée par la volonté d’un dirigeant charismatique. Enfin, cela soulève une question très importante pour moi, qui est celle du rapport de la gauche à l’autoritarisme et à la violence. Cela renvoie à la tradition robespierriste d’une partie de la gauche, qui demeure problématique à mes yeux.

C’est pourquoi, à partir de ce constat critique, vous vous apprêtez à créer un mouvement nommé Place publique, qui serait à mi-chemin entre une organisation militante et un club de réflexion…

En effet. Et ce même si je suis certain que beaucoup de personnes, parmi les électeurs de LFI, s’inscrivent dans une tradition antiautoritaire, en faveur d’un mouvement plus horizontal et décentralisé, et qui refusent les travers souvent dangereux que je viens d’évoquer. Mais je reste convaincu que ce dont souffre profondément la parole politique à l’heure actuelle est l’illusion de l’omniscience.

À Place publique, nous souhaitons être à la jonction, si possible sous une forme nouvelle, entre une formation politique et un laboratoire d’idées. Il ne s’agit pas simplement d’être un nouveau think tank produisant des notes que très peu de gens vont lire. Mais bien de travailler sur le fond, en rassemblant des élus locaux – comme le maire de Kingersheim (2), ville où l’on expérimente largement la démocratie participative –, des associations défendant l’environnement, comme celles qui luttent contre l’exploitation des « boues rouges » près de Marseille, ou des individus mobilisés contre l’accueil scandaleux qui est réservé aux migrants dans la vallée de la Roya… Il s’agit d’engager des débats, en précisant dès le départ que nous n’avons pas de réponses toutes faites sur tous les sujets. Et de rassembler, car nous pensons que tous les acteurs que je viens de citer, qui travaillent chacun dans leur couloir ou leur segment, ont en fait une vision commune.

Mais comment allez-vous articuler tout cela, sachant que vous n’êtes pas le seul à souhaiter, à espérer, un tel rassemblement ?

Nous ne sommes absolument pas certains de réussir. Mais ce dont nous sommes sûrs, en revanche, c’est qu’il est urgent d’essayer. Pour autant, il ne s’agit pas de créer un parti supplémentaire, ni d’ajouter une liste à gauche aux trois, quatre ou cinq listes dont on prévoit déjà qu’elles se présenteront aux prochaines élections. Nous ne voulons pas construire un parti au sens classique, mais un mouvement où les gens peuvent passer à un moment donné, être adhérents ailleurs tout en venant travailler sur le fond avec nous. Surtout, nous voulons créer un lieu où la majorité des citoyens de gauche sont les bienvenus, c’est-à-dire ceux qui n’ont aucune appartenance partisane.

Notre démarche est davantage de mettre en avant des causes et de faire en sorte que, lorsqu’il y a une mobilisation, nous agissions comme une sorte de plateforme pour réinsérer la cause défendue par cette mobilisation dans une vision globale du monde. Sans de grands meetings avec un orateur qui parle durant deux heures, mais peut-être par des réunions ayant une forme plus participative.

Vous avez participé à la soirée de solidarité du 25 octobre à Paris sur l’accueil des migrants, à l’appel de plusieurs médias, dont Politis. Est-ce un exemple de forme et de méthode que vous souhaiteriez reproduire, dans le cadre de Place publique ?

Tout à fait. Le succès de cette réunion est encourageant, car il montre d’abord qu’il existe une attente véritable, un désir de mobilisation autour de causes précises. Et la vraie bonne nouvelle de cette soirée est qu’une partie sans doute non négligeable de l’opinion est prête à défendre ces principes. Cela fait longtemps qu’il n’y avait pas eu de parole publique défendant et assumant de manière très forte un accueil digne des migrants. Et c’est essentiel puisqu’on avait plutôt l’habitude d’entendre le contraire.

Je crois surtout que cette soirée doit être le début d’une campagne, et que c’est dans cet objectif qu’elle a été pensée. Une campagne qui vienne montrer qu’il y a une bataille culturelle, idéologique et politique à mener, et qu’il existe des troupes pour cela. C’est extrêmement encourageant, sachant qu’il n’y a pas si longtemps on voyait un gouvernement PS poignarder dans le dos la droite allemande lorsqu’elle ouvrait ses frontières, ou un dirigeant de la gauche radicale française dire tout de go qu’il n’aurait certainement pas agi comme Angela Merkel…

Quelles sont les grandes causes sur lesquelles Place publique souhaite s’engager ?

Nous ne prétendons pas tout renouveler, mais nous voulons nous inscrire dans les combats fondamentaux de l’époque. Aussi, nous avons quatre piliers principaux de mobilisation : l’écologie, qui va subsumer l’ensemble, la démocratie, l’Europe et les solidarités sociales. Pour chacun de ces quatre piliers, nous convierons des porteurs de causes (nous en avons déjà une trentaine) qui mèneront des combats précis et développeront des projets en fonction de ces combats. Cela va ainsi, comme je l’ai déjà évoqué, du combat contre les boues rouges à Marseille à des expériences de gouvernance locale en Alsace. Mais, comme ces expériences existent déjà (et nous vivons une époque où il n’y a jamais eu autant de citoyens engagés dans des associations et au niveau local), tout l’enjeu est de montrer qu’elles participent d’une même vision du monde, qu’il s’agit de développer à partir de ces mobilisations que nous relayerons.

Au lieu de proposer une idéologie toute faite, nous souhaitons tirer un fil, avec les porteurs de causes, pour construire peu à peu une vision du monde avec tous ceux qui voudront s’investir et réfléchir avec nous. Et, si cela fonctionne, nous pourrons espérer faire monter une nouvelle génération de politiques, sans commencer d’emblée par le premier combat électoral qui se présente si nous n’avons pas d’abord travaillé sur le fond. Cela prendra du temps, peut-être, et rien ne garantit que nous réussirons. Mais nous devons essayer.

Face à la situation catastrophique de la planète, de la démocratie et de la gauche aujourd’hui, il est absolument déprimant d’avoir quatre listes dont les différences de fond face aux enjeux, voire aux périls, actuels sont tout de même, au-delà des nuances légitimes, extrêmement maigres. C’est pourquoi je ne pars en rien avec l’objectif de faire une cinquième liste, mais de travailler sur des sujets de fond et de faire d’abord des propositions politiques. Et si d’autres s’emparent de celles-ci, tant mieux !

(1) Titre d’un livre de Chantal Mouffe (2005), traduit de l’anglais par Pauline Colonna d’Istria, Albin Michel, 2016.

(2) Jo Spiegel, maire de Kingersheim, en Alsace, depuis 1989.

Les Enfants du vide. De l’impasse individualiste au réveil citoyen, Raphaël Glucksmann, Allary, 218 pages, 18,90 euros.