Le siège de la Société générale « nettoyé » par des militants écolos
Le 14 décembre, jour de clôture de la COP 24, des centaines de militants ont convergé à Paris pour dénoncer la banque et ses investissements massifs dans les énergies fossiles.
A gence ouverte, RAS, prévoir quelqu’un pour tenir la porte. » À 14h05, la coordinatrice du groupe d’une quinzaine de « militants nettoyeurs » reçoit ce feu vert par SMS. L’escouade venue de Lille se dirige vers l’agence de la Société générale située rue de Wattignies dans le XIIe arrondissement de Paris. Armés de balais et d’éponges, ils nettoient l’agence bancaire « salie par ses investissements ». Selon un rapport{: target= »_blank » style= »background-color: rgb(255, 255, 255); » } publié par Les Amis de la Terre en mars dernier, la Société générale est la première banque au monde à financer l’exportation du gaz de schiste nord-américain.
« C’est sale ici », scandent les militants. Les salariés ne semblent pas surpris de les voir mais la plupart refusent de s’exprimer. Sauf dans l’agence située place Félix-Eboué : « Vous avez raison, ça ne fait pas de mal une piqûre de rappel sur les questions environnementales. Ce n’est pas parce que Trump n’en a rien à faire que nous on doit le suivre, il faut penser à nos enfants et nos petits-enfants », glisse un employé de l’agence. Un Bob l’Éponge de taille humaine accompagne chaque groupe de « nettoyeurs ». La mascotte de l’opération est un outil très efficace pour s’attirer la sympathie des clients. Un militant prend le temps de distribuer des tracts et d’entamer le dialogue pour expliquer le but de leur action. 14h10. « C’est trop sale ! », lance la coordinatrice du groupe. À ce mot, tous les activistes déguisés en techniciens de surface sortent et prennent la direction de l’agence suivante.
Depuis le mois de septembre, les associations ANV COP21 et Les Amis de la Terre « nettoient » les agences de la Société générale partout en France. Aujourd’hui c’est le grand nettoyage, la date n’est pas choisie au hasard. La COP 24 se termine en Pologne et les engagements de l’accord de Paris ne sont toujours pas tenus. Plus de 900 militants écologistes et non violents se sont donc réunis dès 10 heures devant le siège de la banque française, boulevard Haussmann, à Paris.
Ils étaient attendus par huit camions de CRS et leurs équipages. Dès le début du rassemblement, les CRS traînent les militants assis sur la chaussée pour les mettre sur le trottoir. Certains policiers sont attentionnés et demandent aux militants s’ils ne leur font pas de mal, tandis que la plupart les traînent sans ménagement et utilisent du gaz lacrymogène. « La police doucement, on fait ça pour vos enfants », clament les militants. Les prises de parole, les chansons et les slogans s’enchaînent malgré tout. « Il y a un tel décalage entre les discours pro-écologie de Macron à l’international et la manière dont il traite les militants sur le territoire », tonne Malika Peyraut, la porte-parole de l’association Les Amis de la Terre. Elle s’indigne du fait que le gouvernement réprime violemment une manifestation pacifiste.
Jason Opena Disterhoft, militant de l’association Rainforest Action Network, est venu de San Francisco pour expliquer la situation aux États-Unis :
Il y a trois gros projets d’extraction dans la vallée du sud du Texas, dont le Rio Grande LNG dans lequel la Société générale est impliquée. Les habitants se mobilisent, un collectif de pédiatres a partagé une lettre ouverte décrivant les risques sanitaires et environnementaux liés à ce nouveau chantier d’extraction d’énergie fossile.
Les peuples autochtones, notamment les Estok’Gna sont également mobilisés pour défendre leurs droits et leur terre ancestrale. Dans une lettre ouverte à destination des militants écologistes, la Société générale s’explique : _« Lorsqu’il est extrait et suivi dans le respect de normes environnementales strictes, le gaz de schiste américain est utile à la transition énergétique, parce qu’il permet d’accélérer la sortie du charbon. » Les associations réfutent cet argument et espèrent encore convaincre la Société générale de se retirer du projet. L’espoir est permis : en 2017 la BNP s’est retirée d’un des projets suite à une puissante mobilisation des associations écologistes.
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