Les insectes menacés de disparition mondiale
Deux chercheurs australiens publient une étude montrant que la proportion des espèces d’insectes en déclin rapide dépasse 41 %.
dans l’hebdo N° 1541 Acheter ce numéro
Depuis quelques années, les automobilistes se réjouissent, car même après un long parcours sur les routes ils n’ont plus de traces d’insectes sur leurs pare-brises. Depuis quelques années, les oiseaux ne trouvent plus rien à manger sur les calandres des motrices qui arrivent dans les gares parisiennes ou au bout de leurs voyages dans les terminus de province où ils faisaient de véritables festins.
Pourquoi ? Tout simplement parce qu’en France et dans la plupart des pays du monde, les insectes volants se sont raréfiés ou ont disparu. Ce constat avait été fait en 2018 par des scientifiques français travaillant sous la direction de Vincent Bretagnolle.
L’étude menée par deux chercheurs australiens – qui doit paraître au mois d’avril dans la revue Biological Conservation –_ est implacable et effarante. Francisco Sanchez-Bayo et Kris Wyckhuys, deux entomologistes reconnus des universités de Sydney et du Queensland, expliquent que la proportion des espèces d’insectes en déclin rapide dépasse 41 %. Ce chiffre est de deux à huit fois plus important que pour les vertébrés. Ils estiment qu’un tiers des espèces sont tout simplement menacées d’extinction. Conclusion des chercheurs :
Un tel événement ne peut pas être ignoré et devrait pousser à agir pour éviter un effondrement qui serait catastrophique pour de nombreux écosystèmes naturels.
Oiseaux et chauve-souris aussi en danger
Cette chute brutale du nombre et de la quantité de ces insectes peut être mise en lien avec la diminution du nombre et de la variété des espèces d’oiseaux, qui n’ont plus assez à manger, notamment au moment de leur nidification. Faute de nourriture, les oisillons meurent. Car tous les oiseaux ne sont pas des granivores et, de plus, au moment où ils nourrissent les jeunes, les parents doivent manger quelques insectes qui leur apportent un complément de protéines.
L’autre conséquence de la raréfaction puis de la disparition des insectes concerne à la fois les plantes sauvages, les plantes médicinales, les fruits et les légumes. Car ceux-ci doivent être pollinisés par les insectes – et pas seulement par les abeilles. Même les plus minuscules participent à ce travail et au fonctionnement de l’agriculture. Autre remarque : des centaines d’espèces de papillons, de libellules, de guêpes et d’abeilles sauvages ont déjà disparu dans de nombreux pays du Nord comme du Sud. Les dégâts n’ont pas de frontières.
Les oiseaux ne sont pas les seules victimes, puisque les chauve-souris, déjà en régression en France, se nourrissent également d’insectes. Comme les lézards, les grenouilles et les crapauds. Pour ces derniers, la menace vient aussi de la pollution de l’eau, qui élimine les têtards.
S’agissant des causes de ce qu’ils nomment à plusieurs reprises « catastrophe », les scientifiques en désignent au moins trois. D’abord, le bouleversement des écosystèmes et la disparition rapide des zones humides où se reproduisent de nombreux insectes. Ensuite, la progression de l’agriculture intensive et l’utilisation des pesticides et des insecticides. Et, enfin, les changements climatiques en cours.
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