Nouvelle « mise à l’abri » temporaire de réfugiés à Paris
Le 31 janvier porte de la Villette, plus d’une centaine de migrants ont été « mis à l’abri » par la préfecture d’Ile-de-France. Les associations interrogent l’efficacité d’une telle évacuation, la quatrième en une semaine, ainsi que la nouvelle sémantique de l’administration.
Jeudi matin, 31 janvier, porte de la Villette à Paris, « 127 hommes isolés ont été pris en charge », annonce la préfecture de la région Ile-de-France. Par ailleurs, « 13 personnes vulnérables, parmi lesquels un mineur, un couple avec enfant et trois femmes seules ont été pris en charge par la Ville de Paris ». Ces réfugiés vivaient dans un campement insalubre et ont été emmenés en bus dans des gymnases ou des centres d’accueil et d’examen des situations (CAES) pour être « mis à l’abri », selon l’expression employée par la préfecture. Zelda, coordinatrice à Utopia 56, collectif de soutien aux migrants, parle plutôt d’« évacuation » mais considère que l’opération « a été bien organisée et très rapide », contrairement à celle survenue porte de la Chapelle deux jours plus tôt, le 29 janvier, « la moins bien organisée du siècle », cingle-t-elle.
Des bénévoles de plusieurs associations avaient prévenu en amont les réfugiés de la Villette de ce qui les attendait. Au moment de partir, certains ont refusé de monter dans les bus. « Ils savaient qu’ils retourneraient dans la rue quelques jours après, du fait de leur situation administrative… », explique Jean-Jacques Clément, bénévole du collectif Solidarité migrants Wilson. La préfecture régionale assure de son côté que l’accueil temporaire dans des structures dédiées, comme dans les gymnases, est « inconditionnel » : si le nombre de places le permet, tout réfugié doit être accueilli, quelle que soit sa situation administrative, jusqu’à ce qu’il obtienne une place dans un CAES où sa situation médicale, sociale et administrative sera étudiée. Actuellement, cinq CAES sont ouverts en Île-de-France, ce qui correspond à 750 places.
L’opération de la porte de la Villette, la quatrième de ce type en un peu plus d’une semaine, survient dans une période de froid et d’épisodes neigeux. Elle s’inscrit également dans un contexte de forte hausse des demandes d’asile. Selon la préfecture, en 2018, celles-ci ont augmenté de 45 % en Île-de-France et, plus largement, de 22% en France. Malgré l’ouverture de 1 200 places temporaires supplémentaires dans des hébergements d’urgence en janvier 2019 en Île-de-France, les places manquent encore. Porte de la Chapelle, 200 personnes n’auraient pas pu monter dans les bus de toutes façons, faute de place à bord, raconte Zelda. Elles auraient, par conséquent, dû rester au campement.
La préfecture « maraude »
Le service de communication de la préfecture d’Ile-de-France refuse de parler d’ « évacuation », type d’opération qui « ne laisse pas le choix aux personnes de partir__ ». Il lui préfère désormais l’expression de « mise à l’abri » ou, plus récemment encore, le terme « maraude », habituellement utilisé par les associations qui sillonnent les rues pour aller à la rencontre de sans-abris, afin de renouer du lien social ou de distribuer des produits de première nécessité. Les « maraudes » se distinguent des « évacuations » car « elles mettent à l’abri des personnes volontaires de manière régulière et inconditionnelle, précise encore le service de communication de la préfecture. Quasiment chaque semaine, l’État finance des maraudes. Depuis 2015, plus de 64 000 hébergements ont été proposés aux réfugiés ».
Pour Zelda, « évacuation » reste le terme le plus adapté car la mise à l’abri « n’est que temporaire. Dans deux jours, les évacués seront peut-être de nouveau à la rue. Les évacuations se répètent et rien ne change, les campements se reforment à chaque fois ». Quelques nuits au chaud, c’est toujours ça de pris, mais quelles solutions d’hébergement ensuite quand les situations administratives restent dans l’impasse ?
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