Philippe Laccarrière : Jarrett bœuf

Avec son nouveau quartet formé en 2017 et un invité, Philippe Laccarrière signe son huitième album, suivant un parcours de fidélités musiciennes et d’expériences variées. Du solo en hommage à seize contrebassistes fétiches (Tributes, 2015) au Lacca’s Dream’n’Bass à géométrie variable (2010), des poèmes de Mahmoud Darwich (Onze astres sur l’épilogue andalou, 2006) aux Chansons collages pour deux contrebasses et sept voix (2014), de Bill Evans à Claude Nougaro, de Christian Escoudé à Bernard Lubat en passant par Coltrane et Jarrett, influences de toujours, Laccarrière s’est construit une identité éclectique servie par une grande rigueur musicale.

Ce nouveau disque, hommage au Backhand de Keith Jarrett paru en 1975, explore en toute liberté les multiples possibilités du quintet de jazz. Au saxophone alto et à la clarinette, Sébastien Texier excelle, mélodiquement très inspiré. Le jeune pianiste libanais Fady Farah s’immisce avec une élégance et une imagination remarquables dans cette série de huit compositions d’une intimité touchante. Le trio rythmique formé par ­Guillaume Dommartin à la batterie, Hubert Colau aux percussions multiformes (sur quatre titres) et ­Philippe Laccarrière à la contrebasse électrique emmène la musique avec une évidence et une souplesse enveloppantes.

On n’a pas de mal à saisir « cette espèce de dynamo d’électricité qui passe entre le public et les musiciens ». Une énergie palpable sans être envahissante, à retrouver sur ce bel opus et en concert dans le sud de l’Essonne, territoire jazzistiquement dynamisé par un Philippe Laccarrière viscéralement convaincu qu’il faut ouvrir de nouvelles voies à la musique, « en dehors des monopoles marchands ». Ainsi est né le festival Au sud du Nord en 1996, pour faire vivre le jazz en zone ­rurbaine sensible.

Backhand Project, 15 mars, festival Au sud du Nord (ausuddunord.fr) à Breuillet (91) ; 21 mars, Péniche Marcounet, Paris.