« Donner du pain n’est pas un crime ! »

Le collectif Solidarité Migrants Wilson interpelle Anne Hidalgo sur la protection des réfugiés et de ceux qui les aident, et organise une grande maraude solidaire pour revendiquer le droit de manger, dimanche 23 juin, à Paris.

Marion Dugrenier  • 21 juin 2019
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« Donner du pain n’est pas un crime ! »
© crédit photo : Christophe ARCHAMBAULT / AFP

P aris ne doit pas devenir Calais ! » Pour protester contre les conditions de vie des réfugiés dans la capitale et contre les intimidations des bénévoles associatifs par les forces de l’ordre, le collectif Solidarité Migrants Wilson organise une grande maraude solidaire, dimanche 23 juin à 13h, porte d’Aubervilliers à Paris.

À Paris comme à Calais, c’est un cycle infernal fait de campements, démantèlements, dispersions et harcèlements que connaissent les migrants. Après avoir été délogés du centre et des quartiers de vie de la capitale, à l’image des campements démantelés près du canal Saint-Martin l’an dernier, ils sont désormais chassés des portes de la ville. Installés au bord du périphérique parisien, devant l’église Sainte-Geneviève-de-la-Plaine, à Saint-Denis, 200 à 300 migrants ont été évacués de leur campement de fortune par les forces de l’ordre, mercredi 19 juin. Une opération récurrente depuis quelques années. « Les exilés, y compris les familles et mineurs isolés, sont ainsi soumis à un exode incessant, contraints de se réfugier dans des endroits dangereux où il s’avère très difficile de leur venir en aide, dénonce le collectif Solidarité Migrants Wilson, très actif au nord de Paris. Dans ces conditions, l’accès aux droits devient tout à fait aléatoire tant dans le domaine social que médical ou juridique. »

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Distributions de repas entravés, saisie et destructions d’effets personnels… Les associations d’aide aux migrants s’insurgent depuis des années contre le harcèlement des exilés par les forces de l’ordre. _« Régulièrement les personnes se retrouvent privées même de tentes et de couvertures, livrées à la faim, aux rats et à la pluie et sont parfois brutalisées, illustre l’association Solidarité Migrants Wilson. Cette semaine des enfants ont même été privés de leurs médicaments ! » Son de cloche similaire du côté des bénévoles engagés dans les associations d’aide aux migrants : contrôles d’identité, ordres de cesser les distributions de nourriture, menaces d’être « embarqué au poste » et intimidations physiques avec des gazeuses sont notamment recensés. « Après une accalmie, nous assistons à une recrudescence de ces pratiques d’autant plus inquiétante que l’été est souvent une période de “nettoyage” des populations jugées indésirables », alerte Solidarité Migrants Wilson dans un communiqué.

« Délit d’humanité »

Dans un courrier envoyé le 17 juin, le collectif interpelle directement la maire de Paris, Anne Hidalgo, l’invitant à prendre des mesures de « protection pour les exilés de Paris et les personnes leur venant en aide ». La récente charte de la distribution alimentaire mise au point par l’équipe municipale préoccupe particulièrement les associations d’aide aux migrants, qui y voient une « criminalisation des aidants ». Dans un objectif affiché de « réguler les distributions sauvages préjudiciables aux riverains », la charte soumet désormais les distributions à autorisation préalable… « Dans les faits, cela est utilisé par la préfecture et les forces de police comme prétexte pour réprimer l’aide », dénonce le collectif, qui milite pour la suppression du « délit d’humanité ».

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Dimanche 23 juin, bénévoles et citoyens se sont donné rendez-vous au square Anaïs-Nin, près de la porte d’Aubervilliers à Paris, pour une grande maraude solidaire. L’événement sera suivi d’un concert de soutien organisé par La Station Gare des Mines, auquel participera notamment Eddy de Pretto. Tous viendront donner de la voix afin de « pallier les manquements des pouvoirs publics […] et revendiquer le droit de manger et de distribuer de la nourriture sans être inquiétés ! »

Société
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