Un pouvoir consolateur

Le leader des Veils signe un premier album solo d’une fascinante et émouvante beauté.

Jacques Vincent  • 25 juin 2019 abonnés
Un pouvoir consolateur
© crédit photo : Alberto Pezzali/afp

On ne va pas faire semblant. Semblant d’être familier des Veils, de leur musique et de leurs cinq albums parus depuis 2001. Ce n’est pas le cas. Ils font partie de ces groupes dont on connaît le nom mais dont on n’a jamais eu l’occasion de rencontrer la musique. Sans raison particulière, seulement une rencontre qui ne s’est pas faite. Ou alors sans le savoir puisqu’on découvre en cherchant un peu que certaines chansons apparaissent dans des séries (Twin Peaks, Lucifer) et même dans Il Divo, le film de Paolo Sorrentino. Et puis voilà qu’arrive le premier album solo du chanteur et leader des Veils, Finn Andrews. Cette fois, la rencontre se fait. Elle est mémorable.

Pour l’anecdote, Finn Andrews est le fils de Barry Andrews, claviériste et saxophoniste du groupe britannique XTC, mais il a vécu une grande partie de sa jeunesse en Nouvelle-Zélande et a d’ailleurs formé la deuxième version de son groupe avec des musiciens locaux. Sa musique est une drogue dure. On peut prendre n’importe laquelle des dix chansons de ce disque, l’écouter une seule fois et tomber dans une addiction définitive.

Dès le morceau d’introduction, « Love, What Can I Do », Andrews porte la mélancolie au rang de beauté absolue. (« Amour, que puis-je faire ? Je veux te serrer fort ce soir/Amour, que puis-je faire ?/Tu illumines mon univers/ Et quand la nuit tombera, je te verrai dans mon sommeil/Et quand le jour viendra, la peine sera complète. ») La douleur de l’absence résumée en deux lignes.

La voix, fragile et pure, porte à la fois douceur et douleur. Elle est l’élément central, secondée par un piano aux lourds accords. Ensuite arrivent les cordes et des chœurs féminins qui font parfois littéralement fondre (« Spirit In The Flame ») ou ne sont qu’un souffle quand la chanson tient à ce fil ténu (« One Piece At A Time »).

Finn Andrews, qui écrit des chansons depuis sa préadolescence, possède une finesse d’écriture qui lui permet de faire naître des émotions intenses dans une économie de mots, une évidence mélodique et un sens de l’équilibre dans la trame instrumentale. Ses chansons sont sombres et désolées. Elles parlent de peine, de chute, de chance gâchée, d’une humanité « sans espoir et cabossée », « à la recherche d’un port dans la tempête », taraudée par cette question : à qui revient la faute ? Elles possèdent pourtant un réel pouvoir consolateur.

One Piece at a Time, Finn Andrews, Nettwerk.

Musique
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