Grève : les facs ferment, les étudiants l’ouvrent

AG en plein air, convergences avec d’autres groupes en lutte… Les jeunes sont nombreux dans les cortèges et très mobilisés.

Adeline Malnis  • 11 décembre 2019 abonné·es
Grève : les facs ferment, les étudiants l’ouvrent
© Adeline Malnis

Mercredi 4 décembre, à la veille de la première journée de mobilisation interprofessionnelle contre la réforme des retraites, quelques centaines d’étudiants se réunissaient en assemblée générale place du Panthéon. Pourquoi sur une place publique et pas à l’intérieur de la Sorbonne, à quelques mètres de là ? Le site venait de fermer, seulement deux heures avant la tenue de l’AG. La veille, c’était Tolbiac – où une AG était également prévue – qui fermait « par mesure de précaution et de sécurité », annonçait la présidence de l’université.

Mais les étudiants font une tout autre analyse de la situation.  « L’université veut nous empêcher de nous mobiliser. Ils ferment tous les bâtiments uniquement parce que nous avions prévu une AG qui aurait duré quoi, une heure ? Ils sont prêts à annuler tous les cours juste pour nous empêcher de nous organiser », tonne à la tribune Tom, membre de l’organisation Sorbonne en lutte.

Pas de salle, pas de micro et surtout un point de rendez-vous déplacé à la dernière minute… Malgré les difficultés induites par la fermeture des facs, les étudiants parviennent tant bien que mal à s’organiser. Devant l’impossibilité d’établir des actions au sein même de leur établissement, les 250 à 300 étudiants présents décident de se rallier au cortège Interfac pour manifester le 5 décembre auprès des salariés. Réunis sous la même bannière, ils sont venus protester contre une réforme des retraites qu’ils jugent injuste, mais pas seulement. « Le mot d’ordre, c’est la convergence des luttes, explique Baïane, étudiante en philosophie à Paris-I. C’est un ras-le-bol qui s’exprime face au contexte général : la précarité, le déni des enjeux écologiques… Il y en a marre de cette société ultracapitaliste qui donne tout aux patrons et oublie les autres. » Un avis que partage -Joachim, qui prépare l’agrégation à Paris-III : « La colère s’exprime avant tout sur les retraites, mais le sujet de fond de cette mobilisation, c’est la précarité, qui touche tout le monde. Il faut montrer au gouvernement que nous sommes unis parce que nous avons des intérêts en commun qui sont différents des siens. Nous ne voulons pas juste le retrait de cette réforme, c’est tout le système qui doit changer. »

Après cette première journée de mobilisation réussie, l’Interfac est bien décidée à ne pas en rester là. Mais, à l’inverse des étudiants de Montpellier, Lyon, Toulouse ou Nantes, les Parisiens sont dans l’impossibilité d’occuper leurs universités, fermées de manière préventive jusqu’au lundi pour certaines, jusqu’à nouvel ordre pour d’autres. Qu’à cela ne tienne, de nouvelles AG « sauvages » sont prévues. Des petits groupes se joignent aux salariés de la RATP pour participer au blocage des dépôts de bus. D’autres aux lycéens qui bloquent des établissements depuis le 4 décembre. « Ce qui est marquant, c’est que, même si nous sommes un public minoritaire dans la mobilisation, personne ne part battu », analyse Sam (1), doctorant en histoire à Évry.

« Nous sommes militants et très engagés, renchérit David, étudiant en histoire et membre organisateur de la mobilisation Interfac. Les gens sont très sérieux et impliqués. » L’Interfac s’est d’ailleurs de nouveau engagée aux côtés des gilets jaunes et des syndicats en participant aux rassemblements du 7 décembre contre la précarité. « Nous avons l’idée que ce n’est pas en restant dans son coin qu’on peut se défendre. Il faut construire des choses pour organiser la lutte à long terme », résume Sam.

(1) Le prénom a été modifié.

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