La vie devant soi

Portrait d’une petite ville de Floride, Pahokee, une jeunesse américaine rend compte d’un quotidien ordinaire, animé par son lycée et rythmé par ses matchs de foot.

Jean-Claude Renard  • 11 décembre 2019 abonné·es
La vie devant soi
© Arizona Distribution

Des stades entourés de palmiers, des pelouses verdoyantes sous un ciel clément. On s’entraîne ardemment au football américain, fierté de la cité, Pahokee. Une petite ville rurale au sud de la Floride, de presque six mille âmes, qui soutient son équipe. Dans les couloirs de Pahokee High School, on s’affaire pour les prochains concours. À celui ou celle qui représentera l’établissement. On choisit ses affiches, ses slogans, tandis que les campagnes s’avancent également sur les réseaux sociaux. Temps d’incertitude. Affaire de popularité dans les rangs, d’amitiés.

« Profiter de la vie, être fidèle, planifier. » Tel est le credo d’un élève. Un autre avance ses ambitions en matière d’études, avant de vouloir enseigner auprès des enfants défavorisés. Parallèlement, deux candidates s’opposent pour le titre de miss. L’une, Briana, donne ses conseils : « Restez humble et il vous arrivera de grandes choses. » Sa rivale, Na’Kerria, a l’intention de suivre des études d’infirmière. Et martèle : « Pas besoin d’avoir beaucoup d’amis, juste des amis sur lesquels on peut compter. » Au sortir des votes suivra une vaste parade à travers la ville. Costumes de fête et paillettes, majorettes en tête.

D’autres pensionnaires songent déjà à l’année suivante, à l’université, en fonction des bourses. Il s’agit toujours de financer ses études, peu importe lesquelles finalement, en « priant Dieu » pour que ça marche. Comptent surtout les soirs de match, qui vont déterminer le vainqueur du trophée Muck Bowl. L’effervescence gagne alors le terrain et les tribunes. On encourage ses gars, les camarades, les Devils de Pahokee. Chaque match est ponctué de danses, de démonstrations de pom-pom girls, de fanfares rythmées par les percussions.

Telle est la vie de Pahokee, partagée entre le foot, les parades, les études et… le foot toujours, avec ses heures d’entraînement, sa douce hystérie collective encadrant les rencontres, au fil des victoires menant jusqu’au titre de meilleure équipe de Floride.

Alternant les plans longs, larges ou resserrés, dans leur premier long métrage documentaire (trop long, à vrai dire), Ivete Lucas et Patrick Bresnan filment autant la ville, avec ses façades colorées, ses boutiques, sa signalétique particulièrement prononcée rompant l’horizontalité des champs alentour, et les groupes de fans qu’une galerie de personnages s’exprimant face caméra. Le tout-venant, sans commentaire, pas même de banc-titre, sans accompagnement musical.

Curieux portraits qui se dessinent là. Curieuse jeunesse, souvent calée dans l’insouciance, loin des turpitudes de la Maison Blanche et de son locataire (jamais mentionné, ni évoqué). Foin de désœuvrement, mais des existences gouvernées par le ballon, où tout est prétexte à la fête battant le pavé de la ville, à un moment charnière, celui qui mène à la vie adulte. Parmi ces encore très jeunes, Junior se distingue par d’autres responsabilités : il est père d’une mouflette d’un an, combinant tant bien que mal ses études, sa passion des percussions et sa charge paternelle.

Pahokee, une jeunesse américaine, Ivete Lucas et Patrick Bresnan, 1 h 52.

Cinéma
Temps de lecture : 3 minutes